lundi 31 août 2015

Prestations familiales et discrimination

Les prestations familiales ne sont pas versées à tous les étrangers titulaires d'un titre de séjour. Il faut remplir des conditions posées par les articles L 512-2 et D 512-2 du code de la sécurité sociale.

Nous avions saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) d'Angers à la suite d'un refus de la caisse d'allocations familiales.

Par un jugement du 13 mai 2015 n°21400239, le TASS dAngers a jugé que: "En application de l'article 46 de l'accord de stabilisation et d'association entre l'Union européenne et la Macédoine, entré en vigueur le 1er avril 2004, d'effet direct applicable aux prestations familiales, l'absence de toute discrimination fondée sur la nationalité dans le domaine d'application de l'accord implique qu'un travailleur (c'est-à-dire ayant l'autorisation de travailler formalisée par un justificatif de séjour)macédonien résidant légalement dans un Etat membre soit traité de la même manière que les nationaux de l'Etat membre d'accueil, de sorte que la législation de cet Etat ne saurait soumettre l'octroi d'une prestation sociale à un tel ressortissant macédonien à des conditions supplémentaires ou plus rigoureuses par rapport à celles applicables à ses propres ressortissants; il en résulte que l'application des articles L 512-2 et D 512-2 du code de la sécurité sociale, en ce qu'ils soumettent le bénéfice des allocations familiales à la production du certificat médical délivré par l'OFII à l'issue de la procédure de regroupement familial, instituent une discrimination directement fondée sur la nationalité, doit être écartée en l'espèce".
 
Cette jurisprudence est à rapprocher de celle de la Cour de cassation (5 avril 2013, n°11-17520 et 11-18947, 12 février 2015, n°13-26821), concernant l'Algérie, le Maroc, la Turquie. Il existe d'autres accords internationaux (tels que celui invoqué) qui visent l'Albanie, la Russie, le Monténégro, la Serbie, par exemple.
 
 
Denis SEGUIN
Avocat à  Angers
Spécialiste en Droit des étrangers

mercredi 29 juillet 2015

Demande d'asile Tchétchènes et CEDH

La Cour européenne des droits de l'homme a rendu une décision le 9 juillet 2015 concernant des Tchétchènes (requête R.K/France, n°61264/11)pour lesquels la demande d'asile en France avait été rejetée par l'OFPRA puis par la CNDA (Cour nationale du droit d'asile), comme la demande de réexamen.

Il est renvoyé à une autre décision de la Cour européenne (que nous avions saisie, concernant également des Tchétchènes: 4 septembre 2014, n°17897/09, § 23-25,https://twitter.com/avocat_seguin/status/508880101757685760, http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-146355)concernant la situation générale dans le Caucase du Nord. 

S'agissant de la règle de l'épuisement des voies de recours interne, la Cour rappelle que l'on ne saurait reprocher à un requérant de ne pas avoir utilisé une voie de droit disponible mais ne présentant guère de chances de succès (§42). Selon la Cour, "on ne saurait attendre des requérants qu'ils aient introduit encore un recours devant le tribunal administratif contre l’arrêté de reconduite à la frontière, dans la mesure où les recours en matière d'asile n'ont pas abouti. On ne saurait reprocher au requérant d'avoir poursuivi un seul type de voies de recours à savoir celles ouvertes devant les instances en charge de l'asile et de ne pas avoir introduit de recours devant le tribunal administratif" (§44).

Ce sont également les règles de preuve qui sont ici rappelées par la Cour de Strasbourg. 

En premier lieu, c'est au requérant de produire des éléments susceptibles de démontrer qu'il serait exposé à un risque de traitements contraires aux dispositions de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme.
En second lieu, le récit du requérant était étayé par deux documents dont l'authenticité n'était pas contestée, un certificat médical et une convocation pour un interrogatoire par un juge d'instruction, peu important que les motifs de la convocation n'y soient pas précisés (§70).

Trois éléments conduisent ainsi la Cour européenne à interdire aux autorités françaises de renvoyer les intéressés en Russie: le récit, même entaché de contradictions, les documents produits, et la situation actuelle en Tchétchénie.



Denis SEGUIN
Avocat à Angers
Spécialiste en droit des étrangers

mardi 28 juillet 2015

Protection subsidiaire et ressortissante guinéenne

Mme S...était étudiante en Guinée à Conakry. Sa famille musulmane n'a pas accepté sa relation avec un étranger et l'a persécutée.
Par une décision du 17 juillet 2015 n°15004085, la Cour nationale du droit d'asile, lui accorde la protection subsidiaire.

La Cour dit que l'intéressée a pu préciser les circonstances dans lesquelles elle a pu poursuivre sa relation avec un ressortissant étranger. Elle a développé de manière précise la séquestration qui lui a été infligée. Un certificat médical (établi en France)corroborait ses explications précises. Il est donc établi qu'elle s'expose en cas de retour à des représailles assimilables aux traitements énoncés à l'article L 712-1-b du Ceseda de la part de sa famille sans pouvoir se prévaloir utilement de la protection des autorités de son pays.

lundi 29 juin 2015

OQTF sans délai, concubinage avec enfants et droit à la vie privée et familiale


Le Tribunal administratif de Nantes (que nous avions saisi),   par un jugement du 29 juin 2015 (n°150350),  annule une OQTF au visa de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme:

"Considérant que M. K..., ressortissant arménien né le 24 mai 1986 et entré irrégulièrement en France le 6 septembre 2012, soutient vivre en concubinage depuis le mois d’octobre 2012 avec Mme  S..., ressortissante turque née le 25 novembre 1989 bénéficiant d’une carte de séjour temporaire portant la mention"vie privée et familiale » valable jusqu’au 7 janvier 2016 ; qu’à supposer même que le ledit concubinage ne puisse être regardé comme établi, ainsi que le fait valoir le préfet de Maine-et-Loire, il ressort toutefois des pièces du dossier que les intéressés sont parents d’un enfant né 13 février 2014, et que Mme S... est enceinte d’un second enfant, lequel a été reconnu avant naissance par le requérant, et apparaît affecté par une malformation cardiaque nécessitant une intervention chirurgicale peu après le terme de la grossesse, qui est prévu le 30 juillet 2015 ; que, par suite, l’essentiel du centre des intérêts privés de M. K...réside en France ; que, dans ces conditions, la décision par laquelle le préfet a obligé ce dernier à quitter le territoire français sans délai doit être regardée, dans les circonstances de l’espèce, comme portant une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale, et méconnaît les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que, par voie de conséquence, la décision fixant le pays de destination est elle-même entachée d’illégalité et doit être annulée ;".

Il est fait injonction au préfet de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale.




Denis SEGUIN
Avocat spécialiste en droit des étrangers

lundi 22 juin 2015

refus de séjour et atteinte à la vie privée et familiale

 
Au visa de l'article L 313-11-7° du Ceseda, le tribunal administratif d'Orléans (17 juin 2015, n°1500362), que nous avions saisi,  annule une OQTF. Le préfet concerné avait refusé de délivrer le titre de séjour au motif que l'intéressée était séparée de son concubin. Le juge annule la décision du préfet pour erreur manifeste d'appréciation, pour les motifs qui suivent:
..........................................................................................................................................................
"Il n’est pas contesté que Mme H... a obtenu en juin 2013 un diplôme d’étude musicale et un prix de composition de la Sacem ; qu’il ressort, par ailleurs des pièces du dossier et notamment des multiples attestations produites par d’anciens élèves ou professeurs du conservatoire ou collègues musiciens ainsi que de l’attestation du président de l’association musicale école du Mans en date du 29 janvier 2015, que l’intéressée est parfaitement insérée au sein de la société française et notamment dans le milieu artistique et musical régional depuis 2009 ; qu’il n’est pas contesté qu’elle dispense des cours de violon et participe à de nombreux groupes de musique, projets musicaux et concerts entre autres sur les villes de Tours et du Mans ; qu’il est en outre constant qu’elle maîtrise parfaitement la langue française ; qu’aux termes de l’attestation précitée du président de l’association musicale école du Mans, la participation de l’intéressée est programmée pour trente concerts de classe chantante du département de la Sarthe organisés en partenariat avec le ministère de l’éducation nationale sur l’année scolaire 2015 ; qu’eu égard aux circonstances particulières de l’espèce et à la présence de l’intéressée depuis plus de 13 ans sur le territoire français, le préfet d’Indre-et-Loire en prenant la décision attaquée a porté une appréciation manifestement erronée des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de la requérante" ;.
 
 
 
 
 
Denis SEGUIN
Avocat
spécialiste en droit des étrangers

jeudi 18 juin 2015

Demandeur d'asile en procédure prioritaire et hébergement

Par une récente décision, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande au titre des mesures utiles, procédure prévue à l'article L 521-3 du code de justice administrative (TA Nantes, 10 juin 2015, n°1504373)tendant à enjoindre au préfet d'héberger des demandeurs d'asile en procédure prioritaire.
 
Le juge rappelle que la diligence de l'Etat pour satisfaire aux obligations en matière de prise en charge des demandeurs d'asile est appréciée en tenant compte des moyens dont dispose l'administration. Cette motivation est conforme à la jurisprudence du Conseil d'Etat (CE, réf, 13 août 2010, n°342330).
 
En outre, la situation du demandeur doit être prise en considération pour justifier d'une urgence, laquelle urgence n'était pas établie puisque les demandeurs étaient célibataires et sans enfant, sans problèmes de santé (cf s'agissant de demandeurs d'asile en procédure prioritaire lors d'une procédure de référé-liberté, art.L 521-2 du code de justice administrative, CE, 19 juin 2014, n°381357, CE, 25 janvier 2011, n°345800).
 
On rappellera également que la directive européenne 2003/9/CE du 27 janvier 2003 prévoit que l'autorité compétente doit assurer les conditions d'accueil (et donc le logement)au demandeur d'asile aussi lontemps qu'il est admis à se maintenir sur le territoire en qualité de demandeur d'asile (CJUE, 27 septembre 2012, affaire C-179/11 Cimade et Gisti, §46, "la seconde condition pour l'application de la directive 2003/9 est celle selon laquelle les demandeurs d'asile doivent être autorisés à demeurer sur le territoire de l'Etat concerné en qualité de demandeur d'asile" ). Or, en matière de procédure prioritaire, les demandeurs d'asile ne sont autorisés à demeure sur le territoire de l'Etat français que jusqu'à la décision de l'OFPRA (art.L 742-6 du Ceseda).
 

vendredi 29 mai 2015

Droit au séjour du demandeur d'asile et notification de la décision de la CNDA

L'article L 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que l'étranger demandeur d'asile  "admis à séjourner en France bénficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'OFPRA ou, si un recours a été formé jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile".
 
Il ressort de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué.
A compter de la notification de la décision de rejet par la CNDA, l'étranger n'a plus de droit au séjour.
 
Encore faut-il que la notification ait été faite valablement.
 
C'est ce que vient de juger le Tribunal administratif de Nantes par un jugement du 28 mai 2015 n°1501462:
 
 "En l'absence d'une telle notification, dont la preuve doit être apportée soit par la production d'un avis de réception postal, soit par la justification que le pli n'a pu être remis à son destinataire pour des motifs tenant à  la carence de ce dernier, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger auquel l'asile a été refusé comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire au sens des dispositions de l'article L 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile...Le préfet se borne à produire une copie d'écran du logiciel informatique "télémofpra"indiquant que la décision de la CNDA prise à  l'encontre de l'intéressé a fait l'objet d'une notificationrégulière le 9 janvier 2015; cette capture d'écran n'établit toutefois pas que cette décision ait été effectivement et régulièrement notifiée par la voie postale ou remise en main propre...L'arrêté méconnait les dispositions de l'article L 742-3...".

mardi 26 mai 2015

Roms et expulsion

Ils sont roumains. Ils sont inscrits à Pôle Emploi. Ils ont des enfants parfois très jeunes. Ils occupent une maison à usage d'habitation abandonnée depuis longtemps. Le tribunal d'instance avait ordonné leur expulsion.

Nous avions saisi le juge de l'exécution à la suite du commandement de quitter les lieux.
Par un jugement du 21 mai 2015, le Juge de l'exécution du Tribunal d'Instance d'Angers, accorde un délai pour quitter l'immeuble d'une durée de trois mois à compter de la notification de la décision.

Sont visées par le jugement les dispositions des articles L 412-3 alinéa 1er du code des procédures civiles d'exécution et l'article L 412-4 du même code.

Selon ce jugement, "les requérants sont recevables à solliciter devant le juge de l'exécution un délai pour quitter les lieux, bien que ne pouvant justifier d'aucun titre les autorisant à les occuper et quand bien même ils seraient entrés dans les lieux par voie de fait, dès lors qu'il n'est pas contesté qu'ils ne disposent d'aucune solution de relogement". 

Il est ajouté: "En l'absence de toute solution d'hébergement et/ou de relogement, durable ou non, l'expulsion immédiate des occupants aurait pour conséquence qu'ils risqueraient de se retrouver sans abri, avec de très jeunes enfants".


Réunification familiale Refus de visa Délégation autorité parentale

  TRIBUNAL ADMINISTRATIF  DE NANTES  N° 2305974  Mme S Décision du 18 mars 2024  Tribunal administratif de Nantes  (9 ème Chambre) “...Cons...