CNDA, 8 février 2022, 1ère section, 2ème chambre, n° 21038589:
"§4. Les déclarations détaillées faites par Monsieur P. ont permis à l'audience d'établir sa nationalité afghane, sa provenance de la province de Kaboul ainsi que l'appartenance de son père à l'armée nationale afghane. Si la note en délibéré produite par l'Office permet de remettre en cause la légalité de la taskera présentée par le requérant cet élément ne permet toutefois pas d'infirmer l'analyse faite par la Cour sur son identité et sa nationalité afghane. Il a su apporter de nombreuses précisions sur les fonctions de lieutenant-colonel de son père au sein de l'armée nationale afghane et les circonstances de son meurtre par les talibans. Il a su expliquer de manière cohérente ses craintes en cas de retour du fait des opinions politiques qui lui sont imputés par les talibans en lien avec son père. L'arrivée au pouvoir des Talibans ajoutent à la réalité de ces craintes en cas de retour. Ses propos ont également été détaillées s'agissant du conflit foncier. qui oppose sa famille à une famille rivale et des violences ayant eu lieu entre les différentes parties. Cet élément accentue son profil à risque en pas de retour. Ainsi, il résulte de ce qui précède que Monsieur P. craint avec raison, au sens des stipulations précitées de la Convention de Genève, d'être persécuté en pas de retour dans son pays en raison des opinions politiques qui lui sont imputés. Dès lors, il est fondé à se prévaloir de la qualité de réfugié..."
Une note en délibéré avait été produite par l'OFPRA faisant état du caractère illégal du document d'identité présenté par le requérant. Nous y avions répondu par une note en délibéré.
L'article 47 du code civil dispose que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".L'administration doit apporter des éléments suffisants pour ébranler la force probante des documents étrangers d'état civil produits.
La Cour de justice des Communautés
européennes (devenue Cour de justice de l'Union européenne - CJUE), à
l'occasion d'un litige opposant une ressortissante grecque à une caisse de
retraite allemande, s'est pour sa part penchée sur la force probante des
documents dressés selon la loi locale et en particulier sur un jugement rectificatif
d'état civil. Selon elle les institutions nationales compétentes en matière de
sécurité sociale et les juridictions nationales d'un État membre sont tenues de
respecter les certificats et actes analogues relatifs à l'état des personnes
qui émanent des autorités compétentes des autres États membres « à moins
que leur exactitude ne soit sérieusement ébranlée par des indices concrets se
rapportant au cas individuel en cause » (CJCE,
2 déc. 1997, aff. C-336/94, Dafeki Eftalia c/
Landesversicherungsanstalt Württemberg).
En l’espèce, les éléments avancés par l’OFPRA ne suffisent pas à considérer que le document d'état civil est falsifié. La seule circonstance relevée par le rapport de la police aux frontières que le document reprendrait les caractères apocryphes d’une fiche « alerte FA 13/2013 » et qu’il serait entièrement réalisé en laser toner au lieu d’offset ne permet pas d’en déduire nécessairement qu’il s’agirait d’une contrefaçon. Cette circonstance n’établit pas non plus que l’identité, comme l’âge de l’intéressé seraient inexacts. Le requérant avait obtenu ce document alors qu’il était âgé de 7 ans pour lui permettre d’être scolarisé. Il a toujours considéré ce document comme authentique et conforme à la législation de son pays de nationalité. Par ailleurs, l’OFPRA n’a jamais fait état auparavant de ce document de la police aux frontières en date du 18 décembre 2020, alors que la décision de l’OFPRA est du 8 juillet 2021.
L’OFPRA n’avait pas manqué de relever dans sa décision que les déclarations de l’intéressé « ont démontré une bonne connaissance générale de sa localité d’origine et se sont révélées suffisamment convaincantes sur son parcours de vie et son vécu au quotidien dans un village contrôlé par les autorités afghanes… ». Il a également retenu que : « …ses déclarations sur son quotidien de vie dans ce contexte sont apparues spontanées… ». Ni la nationalité ni la provenance de l’intéressé n’ont été contestées.
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