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Demande de titre de séjour Nationalité Apatride de fait


Le Tribunal administratif de Nantes a jugé que (TA Nantes, 3 mars 2022, 8ème chambre, n°2001054):

"4. En dehors du cas d'une demande à caractère abusif ou dilatoire, l'autorité administrative chargée d'instruire une demande de délivrance de titre de séjour ne peut refuser de l'enregistrer, et de délivrer le récépissé correspondant, que si le dossier présenté à l'appui de cette demande est incomplet.

5. Il est constant que Mme S. a présenté un dossier de demande de titre de séjour contenant un acte de naissance de nature à justifier de son état civil, mais sans produire des documents justifiant de sa nationalité. En réponse au courrier du 29 octobre 2019 des services de la préfecture de Maine-et-Loire demandant de produire de tels documents, l'intéressée, a par l'intermédiaire de son avocat, précisé qu'il ne lui était pas possible de les fournir dès lors qu'elle rencontrait des difficultés pour déterminer sa nationalité et qu'elle avait, en vain, déposé une demande auprès de l'Officier français de protection des réfugiés et des apatrides tendant à se voir reconnaître la qualité d'apatride. Compte tenu de ces explications et de la nature du titre de séjour sollicité, le dossier de demande de titre de séjour déposé par Mme S...doit être regardé comme complet. Par suite, la décision du 13 janvier 2020 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a déclaré irrecevable cette demande, qui ne tient pas compte de la situation particulière dans laquelle se trouve la demanderesse, est entachée d'erreur d'appréciation".

Il est enjoint au préfet d'examiner la demande de titre de séjour présentée aux fins de prendre une décision dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour dans un délai de 8 jours à compter de cette même date.

Même solution et même motivation, pour la mère de Mme S., Mme A (TA Nantes, 3 mars 2022, 8ème chambre, n°2001053).


Note:

Précisons que le titre de séjour était demandé en application de l'article L.435-1 (anc.L313-14) du Ceseda.

Notre cliente se trouvait dans l'impossibilité de prouver sa nationalité. Elle justifiait de son état civil. Par une lettre du 13 janvier 2020, la préfecture rappelait qu'une demande de titre de séjour avait été déposée, qu'une lettre l'informant du caractère incomplet en l'absence de documents de nationalité, lui avait été adressée et que nous avions répondu pour dire que nous n'étions pas en mesure de produire des documents justifiant de la nationalité. Dans cette même lettre du 13 janvier 2020, la préfecture en a déduit que la demande de titre de séjour était "irrecevable", en invitant notre cliente à transmettre un dossier complet.

Même si le statut d’apatride ne lui a pas été reconnu, elle se trouve dans l’impossibilité concrète d’obtenir un quelconque passeport ni même un document justifiant de sa nationalité.

On doit considérer que sa nationalité reste indéterminée. Cette indétermination fait obstacle à toute exécution d’une mesure d’éloignement qui ne pourrait être qu’inapplicable, dès lors qu’aucun Etat n’admettra l’intéressée sur son territoire.

Il résulte de la jurisprudence administrative que l’autorité administrative doit tenir compte de l’impossibilité pour l’intéressée de produire des éléments attestant de sa nationalité dans la mesure où il a été déposé une demande de statut d’apatride. Dans ces cas spécifiques, la Préfecture doit prendre en considération la difficulté pour les demandeurs de produire un passeport ou tout autre document de nationalité (CAA Lyon, 19 mars 2019 n°18LY03311(https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000038338527?init=true&page=1&query=18LY03311&searchField=ALL&tab_selection=all)

 :« Il ressort des pièces du dossier qu’à l’appui de sa demande de titre de séjour, M.C. a produit un acte de naissance établi en Italie, dont le préfet de la Côte-d’Or ne soutient pas qu’il serait un faux, sans que puisse par ailleurs être opposée au requérant l’absence de légalisation de cet acte, procédure inapplicable à un acte établi en Italie. En outre, le préfet ne saurait, pour exiger la production d’un passeport, qui n’est requise par aucune disposition législative ou réglementaire, opposer à l’intéressé le fait qu’il n’a pas indiqué sa nationalité, alors qu’il ressort des pièces du dossier qu’il a entrepris des démarches auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides pour se voir reconnaître le statut d’apatride. Dans ces conditions, et alors même que M.C. avait produit à l’appui d’une précédente demande de titre de séjour un acte de naissance au Kosovo dont il ne conteste pas le caractère falsifié, le préfet de la Côte-d’Or ne pouvait refuser d’enregistrer sa demande de titre de séjour au motif qu’elle était incomplète en l’absence de documents justifiant de l’état-civil et de la nationalité du demandeur. Par suite, M.C. est fondé à demander l’annulation de la décision du 3 novembre 2017 refusant d’enregistrer sa demande de titre de séjour, qui lui fait grief ».


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