Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet :
1. Le recours est dirigé contre la décision du 17 mars 2023 rejetant la demande formée le 1er février 2023 tendant à l’abrogation de l’arrêté du 17 mai 2022, lequel refusait à Mme A le séjour, l’obligeait à quitter le territoire français et fixait les Comores comme pays de renvoi, et non pas directement contre cet arrêté du 17 mai 2022. Dès lors, contrairement à ce que soutient le préfet, ce recours ne saurait être regardé comme irrecevable au motif que l’arrêté du 17 mai 2022 n’a pas été contesté devant le tribunal administratif dans le délai contentieux.
2. Au surplus, malgré les circonstances que l’arrêté du 17 mai 2022 n’a pas modifié la situation de Mme A au regard du droit du séjour et que celle-ci pouvait, postérieurement à cet arrêté, solliciter à nouveau la délivrance d’un titre de séjour, il lui appartenait, si elle s’y croyait fondée, et s’il y avait modification dans les circonstances de fait ou dans la réglementation applicable, de demander à l’autorité administrative l’abrogation du refus de séjour et de l’obligation de quitter le territoire français dont celui-ci était assorti. Par suite, il ne saurait être soutenu que l’abrogation de l’arrêté du 17 mai 2022 serait dépourvue de portée et que les conclusions tendant à l’annulation du rejet de la demande d’abrogation de cet arrêté seraient, pour ce motif, irrecevables.
Sur les conclusions tendant à l’annulation du refus d’abrogation de l’arrêté du 17 mai 2022 :
3. Aux termes de l’article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration : « (…) / L'administration est tenue d'abroger expressément un acte non réglementaire non créateur de droits devenu illégal ou sans objet en raison de circonstances de droit ou de fait postérieures à son édiction, sauf à ce que l'illégalité ait cessé. ».
4. Aux termes de l’article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (…) ».
5. Il ressort des pièces du dossier que, postérieurement à l’arrêté précité du 17 mai 2022, Mme A a été hospitalisée en décembre 2022 en service de pneumologie, après avoir été hospitalisée en réanimation, et a vu, au cours de l’année 2022, son état de santé général se dégrader. Il ressort au surplus du certificat d’hospitalisation que Mme A, qui avait subi un accident vasculaire cérébral ischémique en novembre 2021, souffrait depuis lors de troubles cognitifs et était par ailleurs atteinte d’hypertension artérielle ainsi que de diabète de type II. Dans ce contexte nouveau, marqué par une perte d’autonomie avérée de Mme A, et alors qu’il est constant que ses trois filles, ressortissantes françaises, qui la prennent en charge, résident habituellement sur le territoire métropolitain et qu’elle ne dispose plus d’attaches personnelles ou familiales aux Comores, le préfet du Morbihan ne pouvait, sans apporter une restriction disproportionnée au droit garanti par l’article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, refuser, par sa décision du 17 mars 2023, de procéder à l’abrogation de l’arrêté du 17 mai 2022. Sans qu’il soit besoin d’examiner le surplus des moyens, cette décision doit donc être annulée.
Sur l’injonction :
6. Aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ».
7. Compte tenu de ce qui vient d’être mentionné, il y a lieu d’enjoindre au préfet du Morbihan de délivrer à Mme A, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement, une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale ».
Sur les frais liés au litige :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La décision du 17 mars 2023 rejetant la demande formée le 1er février 2023 tendant à l’abrogation de l’arrêté du 17 mai 2022 par lequel le préfet du Morbihan a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination est annulée.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Morbihan de délivrer à Mme A une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.
Article 3 : L’Etat versera à Mme A la somme de 1 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme et au préfet du Morbihan.
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