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IRTF (interdiction de retour sur le territoire français) Annulation

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF 

DE POITIERS 

N°2402954  

10 décembre 2025 


 

"En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour  une durée d’un an :  

6. Aux termes de l’article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du  droit d'asile : « Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6  et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le  territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français (…). ». Selon l’article L.  613-2 du même code : « (…) les décisions d'interdiction de retour et de prolongation d'interdiction  de retour prévues aux articles L. 612-6, L. 612-7, L. 612-8 et L. 612-11 sont distinctes de la  décision portant obligation de quitter le territoire français. Elles sont motivées. ». Enfin, l’article  L. 612-10 du même code dispose : « Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées  aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de  l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de  la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour  l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour  l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la  prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11. ». 

7. S’il n’est pas contesté que M. O est entré irrégulièrement en France le 13 mars  2023, il a sollicité l’asile dès le 15 juin 2023 et l’arrêté attaqué a été pris le même mois que la décision de la CNDA le déboutant de sa demande. Par ailleurs, il n’est ni établi ni allégué que sa  présence sur le territoire français constitue une menace pour l’ordre public ou qu’il a déjà fait  l’objet de précédentes mesures d’éloignement non exécutées. Dans ces conditions, la décision  contestée portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d’un an est entachée  d’une erreur d’appréciation. 

8. Il résulte de tout ce qui précède que sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres  moyens de la requête, l’arrêté du 11 octobre 2024 de la préfète des Deux-Sèvres doit être annulé  en tant qu’il porte interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d’un an. 

Sur les conclusions aux fins d’injonction

9. Aux termes de l’article L. 613-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du  droit d’asile : « L'étranger auquel est notifiée une interdiction de retour sur le territoire français  est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système  d'information Schengen, conformément à l'article 24 du règlement (UE) n° 2018/1861 du  Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 sur l'établissement, le fonctionnement et  l'utilisation du système d'information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux  frontières, modifiant la convention d'application de l'accord de Schengen et modifiant et  abrogeant le règlement (CE) n° 1987/2006. Les modalités de suppression du signalement de  l'étranger en cas d'annulation ou d'abrogation de l'interdiction de retour sont fixées par voie  réglementaire. ». Aux termes de l’article R. 613-7 du même code : « Les modalités de suppression  du signalement d'un étranger effectué au titre d'une décision d'interdiction de retour sont celles  qui s'appliquent, en vertu de l'article 7 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier  des personnes recherchées, aux cas d'extinction du motif d'inscription dans ce traitement. ». 

10. L’exécution du présent jugement, qui annule la décision portant interdiction de retour  sur le territoire français pour une durée d’un an prise à l’encontre de M. O implique que  l’administration efface le signalement dont il fait l’objet à ce titre dans le système d’information  Schengen aux fins de non-admission. Il y a donc lieu d’enjoindre au préfet des Deux-Sèvres ou au  préfet territorialement compétent de prendre toute mesure propre à mettre fin à ce signalement". 


Denis SEGUIN

Avocat spécialiste en droit des étrangers

Docteur en droit

 

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