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OQTR jeune majeur état civil Mali

 TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE NANTES  ( (6ème chambren° 2206691? 6 juillet 2023: 



2. Aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : << A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance ou du tiers digne de confiance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ou "travailleur temporaire sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ». Aux termes de l'article R. 431-10 de ce code : « L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande : 1° Les documents justifiants de son état civil; (...) » L'article L. 811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. Ce dernier article dispose: << Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ». Ainsi, ces dispositions posent une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère. Il incombe à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question. Il résulte également de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. De plus, il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère, hormis le cas le jugement produit aurait un caractère frauduleux

3. Afin de refuser de délivrer un titre de séjour à M. K, le préfet de Maine-et- Loire a estimé que les documents d'état civil produits ne permettaient pas d'établir son identité. Il s'appuie sur les rapports simplifiés des services de police aux frontières du 17 juillet 2020 ayant relevé que le jugement supplétif d'acte de naissance n° 1349 établi le 17 mars 2020 par le tribunal de grande instance de la commune II du district de Bamako est par nature démuni de tout mode d'impression sécurisé et qu'il comporte une personnalisation incomplète en l'absence de report des références de l'acte de naissance. Ces rapports notent également que l'acte de naissance n° 746/REG15SP établi le 18 mars 2020 est démuni de référence du numéro d'identification nationale (NINA) en méconnaissance des article 5 et 7 de la loi n° 06-040 du 11 août 2006 et de numérotation de souche par procédé typographique et que sa personnalisation méconnaît les articles 124, 125 et 126 du code de la personne et de la famille malien. Ils révèlent enfin que l'extrait d'acte de naissance du 18 mars 2020 est démuni de référence NINA et méconnaît ces derniers articles et que l'ensemble des documents ne respectent pas les articles 554 et 555 du code malien de procédure civile

4. D'une part, le motif tenant au caractère incomplet de personnalisation en l'absence de report des références de l'acte de naissance sur le jugement supplétif, alors que ce dernier a pour but de suppléer l'absence ou la disparition de l'acte de naissance initial, ne saurait démontrer le caractère frauduleux du jugement supplétif du 17 mars 2020. En outre, en se bornant à faire valoir que le jugement supplétif est démuni de tout mode d'impression sécurisé et méconnaît les articles 554 et 555 du code malien de procédure civile, commerciale et sociale dont il ne précise pas la teneur, le préfet de Maine-et-Loire ne démontre pas la fraude dont serait entachée l'édiction du jugement supplétif litigieux

5. D'autre part, le préfet ne précise pas la teneur des articles 124, 125 et 126 du code malien de la personne et de la famille qu'aurait méconnu l'acte de naissance établi le 18 mars 2020 sur lequel l'absence de numérotation de souche par procédé typographique, pour laquelle le préfet ne précise pas à quel titre elle s'imposerait, et l'absence de NINA ne font pas obstacle à ce que puissent être prises en considération les énonciations qu'il contient qui s'avèrent concordantes avec les autres documents produits. Il en est de même de l'extrait d'acte de naissance du même jour. 

6. Dans ces conditions, aucune des circonstances invoquées par le préfet n'est de nature à révéler le caractère frauduleux du jugement supplétif et de l'acte pris pour sa transposition. 

7. Par suite et alors qu'il ne conteste pas le caractère réel et sérieux du suivi de la formation de M. K et son insertion dans la société française, le préfet de Maine-et-Loire a, en estimant que les actes d'état civil joints à l'appui de sa demande de titre de séjour ne permettaient pas d'établir l'identité de M. K, entaché sa décision d'une erreur d'appréciation au regard de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Sur la légalité des décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination

8. Il résulte de ce qui précède que le refus de titre de séjour opposé à M. K est entaché d'illégalité. Comme le soutient le requérant, l'illégalité de ce refus de séjour prive de base légale la décision l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ainsi que la décision fixant son pays de destination

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. K...est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 3 mai 2022

Sur les conclusions à fin d'injonction

10. Eu égard au motif sur lequel il se fonde pour prononcer l'annulation de l'arrêté attaqué, le présent jugement implique nécessairement qu'il soit enjoint au préfet de Maine-et- Loire de munir l'intéressé d'un titre de séjour portant la mention « salarié » ou « travailleur temporaire » dans un délai d'un mois suivant la notification du présent jugement. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte

 

DECIDE

Article 1er: L'arrêté du 3 mai 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de délivrer à M. K... un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai est annulé"




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