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OQTF Jeune majeur Guinée

 

Jugement du Tribunal administratif de Nantes du 4 avril 2023, n°2208191, 1ère chambre:

"4.Aux termes de l'article L.423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile:" Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1.Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur son insertion dans la société française.Aux termes de l'article R.431-10 du même code:"L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande :1° Les documents justifiants de son état civil ;".Et aux termes de l'article 47 du code civil:"Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française.


5.Il n'appartient pas aux autorités françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère, hormis le cas où le jugement aurait un caractère frauduleux, hormis le cas où le document produit aurait un caractère frauduleux. La force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Il lui appartient, en particulier, à cet égard, d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

6. A l'appui de sa demande de titre de séjour et pour justifier de son identité et de son âge, Mr.B. a produit un jugement supplétif rendu le 4 septembre 2018 et un extrait du registre d'état civil du 4 septembre 2018, ainsi qu'une carte d'identité consulaire.

7. Le préfet de... a contesté la valeur probante de ces documents, suivant l'avis des services spécialisés de la police aux frontières, en relevant l'irrégularité du montant du droit de timbre appliqué au jugement supplétif, le mauvais état de de document, qui présente une police différente et une erreur de typographie, ainsi que l'absence de légalisation des documents produits par les autorités guinéennes. Toutefois, la circonstance, à la supposer établie, que le droit de timbre appliqué ne serait pas conforme au droit localement en vigueur, n'est pas de nature à remettre en cause la sincérité des mentions portées dans les documents d'état civil présentés à l'appui de la demande de titre de séjour. De plus, la légalisation se bornant à  constater de la régularité formelle d'un acte, l'absence ou l'irrégularité de la légalisation de cet acte ne fait pas obstacle à ce que puissent être prises en considération les énonciations qu'il contient. Enfin, les erreurs formelles constatées sur le jugement supplétif produit ne suffisent pas pour écarter la présomption d'exactitude attachée à l'article 47 du code civil. Ainsi, aucune des circonstances invoquées par le préfet, lesquelles pour la plupart entendent remettre en cause la façon selon laquelle le juge guinéen a entendu faire application de la loi qui est la sienne, n'est de nature à révéler le caractère frauduleux du jugement supplétif et l'acte pris pour sa transcription, qui établissent l'état civil de Mr B.
8. Il s'ensuit que le requérant est fondé à soutenir que le refus de titre de séjour en litige est entaché d'une erreur d'appréciation quant au caractère frauduleux des documents d'état civil produits à l'appui de sa demande...".



cf aussi:



Denis SEGUIN
Avocat spécialiste en droit des étrangers
Docteur en droit



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