lundi 16 octobre 2023

Réunification familiale Soudan date dépôt demande de visa

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE NANTES, N°2215759 , (9ème chambre)


16  octobre 2023  

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“1. M. A ressortissant soudanais, s’est vu reconnaître la qualité de réfugié  par décision du directeur général de l'Office de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du  30 avril 2018. Son épouse et leurs six enfants ont déposé des demandes de visa de long séjour  auprès de l’autorité consulaire française à Khartoum (Soudan) au titre de la réunification familiale.  Par une décision du 11 mai 2022, l’autorité consulaire a refusé de délivrer à Mme  S, aînée de la fratrie, le visa sollicité et par des décisions du 4 août suivant, des  visas ont été délivrés à l’épouse de M. S et à leurs cinq enfants cadets. Par une décision  implicite née le 7 novembre 2022, dont Mme S demande l’annulation, la  commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France a rejeté le recours  formé contre la décision consulaire du 11 mai 2022. 

Sur les conclusions à fin d’annulation

2. Il ressort du mémoire en défense que, pour rejeter le recours administratif préalable  introduit pour Mme S, la commission de recours contre les décisions de  refus de visa d’entrée en France s’est fondée sur l’inéligibilité de la demandeuse à la procédure de  réunification familiale, estimant que celle-ci était âgée de plus de 19 ans à la date de la demande  de visa. 

3. Aux termes de l’article L. 561-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du  droit d’asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant  étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection  subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification  familiale : / (…) 3° Par les enfants non mariés du couple, n'ayant pas dépassé leur dix-neuvième  anniversaire (…) / L'âge des enfants est apprécié à la date à laquelle la demande de réunification  familiale a été introduite ». Aux termes de l’article L. 561-5 du même code : « Les membres de la  famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en  France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités  diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais (…) ». Pour  l’application de ces dispositions, l’article R. 561-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers  et du droit d’asile prévoit que : « La demande de réunification familiale est initiée par la demande de visa des membres de la famille du réfugié ou du bénéficiaire de la protection subsidiaire  mentionnée à l'article L. 561-5. Elle est déposée auprès de l'autorité diplomatique ou consulaire  dans la circonscription de laquelle résident ces personnes ».  

4. Il résulte de ces dispositions que l’âge de l’enfant pour lequel il est demandé qu’il  puisse rejoindre son parent réfugié sur le fondement de l’article L. 561-2 du code de l’entrée et du  séjour des étrangers et du droit d’asile doit être apprécié à la date de la demande de réunification  familiale, c’est-à-dire à la date à laquelle est présentée la demande de visa à cette fin, sans  qu’aucune condition de délai ne puisse être opposée. La circonstance que cette demande de visa ne  peut être regardée comme effective qu’après son enregistrement par l’autorité consulaire, qui peut  intervenir à une date postérieure, est sans incidence à cet égard. 

5. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du courriel adressé par le service des  visas de l’ambassade de France au Soudan le 15 décembre 2020, que des démarches ont été  entreprises par M. S dès cette date en vue de l’obtention de visas de long séjour au titre de  la réunification familiale pour son épouse et leurs six enfants. Par ce courriel, il lui a été rappelé,  s’agissant plus particulièrement de la situation de la requérante, que le dépôt de demande de visa  devait être fait avant qu’elle n’ait atteint l’âge de dix-neuf ans et indiqué que la date d’un tel dépôt  était celle à laquelle les échanges avaient commencé avec elle, soit, en l’espèce, ce 15 décembre.  Dès lors, à la date du dépôt de la demande de visa, qui, eu égard à ce qui précède, doit être regardée  comme étant celle à laquelle l’administration a ainsi répondu à la sollicitation de M. S,  Mme S, née le 1er janvier 2002, était âgée de moins de dix-neuf ans. Dans  ces conditions, la commission de recours a fait une inexacte application des dispositions de l’article  L. 561-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile en refusant de délivrer le  visa sollicité pour le motif exposé au point 2. 

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen de la  requête, que Mme  S est fondée à demander l’annulation de la décision  attaquée”. 


Denis SEGUIN

avocat

spécialiste en droit des étrangers

docteur en droit


mercredi 4 octobre 2023

OQTF sans délai article 8 cedh entrée en France à 15 ans

Tribunal administratif de Nantes (2ème chambre) N°2211635 ,M. K, jugement du 4 octobre 2023 “Considérant ce qui suit : 1. M. K, ressortissant ivoirien né en 2002 est entré en France le 16 mars 2017. Il a été confié aux services de l’aide sociale à l’enfance du département de Maine-et-Loire. Le 19 novembre 2020, il a sollicité du préfet de Maine-et-Loire la délivrance d’un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » sur le fondement des dispositions alors applicables du 2° de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Par un arrêté du 24 mars 2021, il a fait l’objet d’un refus de titre de séjour assorti d’une obligation de quitter le territoire français, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Nantes du 9 juin 2022. Le 3 septembre 2022, il a été interpelé pour séjour irrégulier et par deux arrêtés du 4 septembre 2022, le préfet de Maine-et-Loire, d’une part, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d’office et lui a interdit le retour sur le territoire pour une durée de douze mois, d’autre part, l’a assigné à résidence pour une durée de six mois. M. Kone demande au tribunal d’annuler ces arrêtés. 2. Aux termes de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (…) ». 3. Il ressort des pièces du dossier que M. K est arrivé en France au début de l’année 2017, alors qu’il n’était âgé que de quinze ans et qu’il y résidait donc depuis près de cinq ans à la date des arrêtés attaqués. S’il ne bénéficie plus d’aucune formation depuis qu’il n’est plus pris en charge par les services de l’aide sociale à l’enfance, il ressort des pièces du dossier qu’il a été scolarisé jusqu’en 2021-2022, année au cours de laquelle ses résultats scolaires s’étaient améliorés. Par ailleurs, il justifie être le père d’un enfant français, encore à naître à la date des décisions attaquées mais né depuis en décembre 2022, ainsi que de son union avec la mère de celui-ci. Si le couple ne s’est installé ensemble qu’après les arrêtés attaqués, l’attestation de sa concubine et la reconnaissance anticipée de l’enfant témoignent de la réalité de leur union avant cette date. Enfin, contrairement à ce que soutient le préfet en défense, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant aurait été placé en garde à vue pour des faits de violence sur une personne dépositaire de l’autorité publique, son interpellation, ainsi qu’il ressort du procès-verbal produit, ne résultant que de son séjour irrégulier en France. Dans ces conditions, et alors que le requérant soutient n’avoir plus de lien familial étroit en Côte d’Ivoire depuis le décès de sa mère, il est fondé à soutenir que l’obligation de quitter le territoire français sans délai et l’interdiction de retour pendant un an portent une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard de ses buts et méconnaissent ainsi l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. N° 2211635 4 4. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin, d’examiner les autres moyens soulevés, que le requérant est fondé à demander l’annulation de l’arrête du 4 septembre 2022 portant obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour, ainsi que, par voie de conséquence, de l’arrêté du même jour l’assignant à résidence pendant une durée de six mois. Sur les conclusions à fin d’injonction : 5. Eu égard à ses motifs, le présent jugement implique que le préfet de Maine-et-Loire procède au réexamen de la situation de M. K, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, et lui délivre dans l’attente, dans un délai de dix jours à compter de cette même notification, une autorisation provisoire de séjour”.

Parent enfant malade étranger malade Géorgie

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF 

DE NANTES 

N°s 2211919 et 2214025 

___________ 

Mme L.N

___________ 

4 octobre 2023  

___________ 

335-01-03 


Le tribunal administratif de Nantes 

(2ème chambre)


"Considérant ce qui suit : 

1. Mme N, ressortissante géorgienne née en 1985, est entrée en  France en juin 2021. Sa demande d’asile a été rejetée par une décision du 15 avril 2022 de l’Office  français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision de la Cour nationale  du droit d’asile du 11 juillet 2022. Elle a sollicité du préfet de Maine-et-Loire la délivrance d’un  titre de séjour sur le fondement de l’article L. 425-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers  et du droit d’asile. Sa demande a été rejetée par un arrêté du 27 juillet 2022. Par un arrêté du  5 octobre 2022, le préfet de Maine-et-Loire l’a obligée à quitter le territoire français dans un délai  de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d’office lorsque le  délai sera expiré. Mme N demande au tribunal d’annuler ces arrêtés. 

Sur la jonction :  

2. Les requêtes nos 2211919 et 2214025 concernent la situation d’une même requérante  et ont fait l’objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul  jugement. 

Sur les conclusions à fin d’annulation :  

3. Aux termes de l’article L. 425-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et  du droit d’asile : « L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite  une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une  exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé  dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et  familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. (…) ». 


4. Aux termes de l’article L. 425-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et  du droit d’asile : « Les parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions prévues  à l'article L. 425-9, ou l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité  parentale sur ce mineur, se voient délivrer, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en  France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, une autorisation provisoire de  séjour d'une durée maximale de six mois. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas  opposable. / Cette autorisation provisoire de séjour ouvre droit à l'exercice d'une activité  professionnelle. / Elle est renouvelée pendant toute la durée de la prise en charge médicale de  l'étranger mineur, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être  satisfaites. / Elle est délivrée par l'autorité administrative, après avis d'un collège de médecins du  service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans les conditions  prévues à l'article L. 425-9. ». 

5. Pour refuser à Mme N la délivrance d’un titre de séjour sur le fondement  de ces dispositions, le préfet de Maine-et-Loire s’est fondé sur le motif tiré de ce que le fils de la  requérante, né en 2016 et souffrant d’une encéphalopathie développementale et épileptique  résistante, s’accompagnant d’une régression psychomotrice, peut bénéficier en Géorgie des soins  appropriés à son état de santé. 

6. La partie qui justifie d’un avis du collège de médecins du service médical de  l’Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée  comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence ou l’absence d’un  état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d’un titre de séjour. Dans ce cas, il  appartient à l’autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous  éléments permettant d’apprécier l’état de santé de l’étranger et, le cas échéant, l’accès effectif ou  non à un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient  d’apprécier si l’état de santé d’un étranger justifie la délivrance d’un titre de séjour dans les  conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. 

7. L’avis rendu par le collège des médecins de l’OFII le 13 mai 2022, dont le préfet  s’est approprié les termes, indique que, si l’état de santé du fils de la requérante nécessite une prise  en charge médicale dont le défaut est susceptible d’entraîner des conséquences d’une  exceptionnelle gravité, celui-ci peut bénéficier d’un traitement approprié dans son pays d’origine. 

8. Il ressort des pièces du dossier que l’enfant T, né en 2016, est suivi dans le  service de neurologie et neurochirurgie de l’enfant du centre hospitalier universitaire d’Angers  pour une encéphalopathie développementale et épileptique résistante s’accompagnant d’une  régression psychomotrice. Il ressort du certificat établi par le Dr V le 20 juillet 2022  ainsi que du certificat du Dr T [médecin géorgien] établi le 4 juin 2021, que les symptômes consistent en  des crises de convulsion, la perte de l’usage de ses membres supérieurs, une grande fatigabilité,  un bavage, l’impossibilité de marcher sans soutien bilatéral plus de quelques pas, et la perte de la  préhension volontaire.  

9. Il ressort en outre des pièces du dossier que l’enfant de la requérante suit un  traitement médicamenteux à base de Micropakine et Buccolam, des anticonvulsivants, et  d’Urbanyl, un anxiolytique. Mme N produit deux prescriptions médicales pour ces  médicaments et justifie de l’ajout du cannabidiol audit traitement. Il ressort en outre du certificat  médical établi par le docteur T en 2021 en Géorgie, que « compte tenu de la nature résistante de l’encéphalopathie épileptique primaire et développementale, il est conseillé au  patient de rechercher des traitements alternatifs à l’extérieur du pays ». Par ailleurs, la requérante  produit une capture d’écran du site géorgien de la pharmacie de Tbilissi « Aversi » répertoriant les  médicaments disponibles dans le pays selon lequel l’Urbanyl, la Micropakine, le Buccolam et le  cannabidiol ne figurent pas dans la liste des médicaments disponibles. Ell


e produit également un  document daté du 9 septembre 2022 émanant de l’agence de régulation des activités médicales et  pharmaceutiques de Géorgie, dont il ressort que les produits pharmaceutiques contenant du  cannabidiol ne sont pas enregistrés sur le marché pharmaceutique de Géorgie, ni ceux contenant  du clobazam, y compris l’Urbanyl. Ces éléments, qui ne sont pas contestés par le préfet en défense,  sont de nature à établir que, contrairement à ce qu’a estimé le collège de médecins de l’OFII dans  son avis rendu le 13 mai 2022, l’enfant de la requérante ne peut pas bénéficier d’un traitement  approprié dans son pays d’origine. Par suite, la requérante est fondée à soutenir que le préfet de  Maine-et-Loire a entaché sa décision de refus de séjour d’une erreur d’appréciation au regard des  dispositions des articles L. 425-9 et L. 425-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du  droit d’asile.  

10. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres  moyens des requêtes, que Mme N est fondée à demander l’annulation de la décision lui  refusant la délivrance d’un titre de séjour ainsi que, par voie de conséquence, des décisions portant  obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination du 5 octobre 2022. 

Sur les conclusions à fin d’injonction

11. Le présent jugement implique nécessairement qu’il soit enjoint au préfet de  Maine-et-Loire de munir l’intéressée d’une carte de séjour temporaire dans un délai de deux mois  suivant la notification du présent jugement.  

Sur les frais liés au litige

12. Mme N a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son  avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et  37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que  Me Seguin renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre  à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros.

Article 1er : Les arrêtés des 27 juillet 2022 et 5 octobre 2022 du préfet de Maine-et-Loire  sont annulés. 

Article 2 : Il est enjoint au préfet de Maine-et-Loire de délivrer à Mme N  une carte de séjour temporaire dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent  jugement. 

Article 3 : L’Etat versera à Me Seguin la somme de 1 500 euros (mille cinq cents  euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du  deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Seguin renonce à  percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État. 

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme N, au préfet de  Maine-et-Loire et à Me Denis Seguin". 


cf également CAA Bordeaux, 12 janvier 2021, n°20BX02361










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