mardi 28 décembre 2021

Sénégal Homosexualité Statut de réfugié


CNDA, 24 décembre 2021, n°21014690, 3ème section, 1ère chambre,


"...2. Un groupe social est, au sens des dispositions de la Convention de Genève constitué de personnes partageant un caractère inné, une histoire commune ou une caractéristique essentielle à leur identité et alors conscience auquel il ne peut leur être demandé de renoncer et une identité propres perçu comme étant différente par la société environnante ou par les institutions. En fonction des conditions qui prévalent dans un pays, des personnes peuvent, en raison de leur orientation sexuelle, constituer un groupe social au sens de c'est disposition. Il convient, dès lors, dans l'hypothèse où une personne sollicite le bénéfice du statut de réfugié en raison de son orientation sexuelle, d'apprécier si les conditions existant dans le pays dont elle a la nationalité permettent d'assimiler les personnes se revendiquant de la même orientation sexuelle un groupe social du fait de regard que porte sur ces personnes la société environnante où les institutions et dont les membres peuvent craindre avec raison d'être persécution être persécuté du fait même de leur appartenance à ce groupe. 

3. Il résulte de ce qui précède que l'octroi du statut de réfugié du fait de persécutions liées à l'appartenance à un groupe social fondée sur une orientation sexuelle commune ne saurait être subordonné à la manifestation publique de cette orientation sexuelle par la personne qui sollicite le bénéfice du statut de réfugié. D'une part, le groupe social n'est pas institué par ceux qui le composent, ni même du fait de l'existence objectif de caractéristiques qu'on leur prête mais par le regard que porte sur ces personnes la société environnante ou les institutions. D'autre part, il est exclu que le demandeur d'asile doivent, pour éviter le risque de persécution dans son pays d'origine, dissimuler son homosexualité où faire preuve de réserves dans l'expression de son orientation sexuelle. L'existence d'une législation pénale qui réprime spécifiquement les personnes homosexuelles permet de constater que ces personnes doivent être considéré comme formant un certain groupe social. L'absence d'une telle législation ne suffit pas à établir que ces personnes ne subissent pas de persécution en raison de leur orientation sexuelle. Des persécutions peuvent en effet être exercées sur les membres du groupe social considéré sous couvert de dispositions de droit commun abusivement appliquées ou par des comportements émanant des autorités ou encouragés, favorisés ou même simplement tolérés par celles-ci.

 

4.Il ressort des sources publiques que l'homosexualité est pénalisée au Sénégal. Ainsi, d'après le rapport du département d'État des États-Unis concernant les droits de l'homme au Sénégal publié en 2020, les relations homosexuelles sont interdites et punies dans ce pays, en vertu de l'article 319 du code pénal, d'une peine d'un an à cinq ans  d'emprisonnement et d'une amende de 100 000 à 1 500 000 francs FA.
Cette disposition est effectivement appliquée, des cas de poursuites et des arrestations ayant été recensés ces dernières années, comme en témoigne une communication de Human Rights Watche au Comité des doits économiques, sociaux et culturels, datée du 15 janvier 2019, laquelle évoque trente huit cas d'arrestations sur des motifs d'orientation sexuelle au titre de l'article susmentionné, entre 2011 et 2016. Les sources publiques disponibles s'accordent à dire que de manière générale, l'homosexualité est perçue de manière particulièrement négative par la société sénégalaise. Ainsi, il est habituel que les homosexuels soient victimes de violences, y compris de la part de leur propre famille, de menaces, voire de viols, comme le rapporte l'article intitulé "Nous sommes des personnes à abattre";"le sort des homosexuels s'aggrave au Sénégal", publié par France Inter le 23 mai 2021. Dans ces conditions, les homosexuels sénégalais constituent un groupe social dont la caractéristique essentielle, à laquelle ils ne peuvent renoncer est leur orientation sexuelle, et dont l'identité propre est perçue comme étant différente par la société environnante et par les institutions sénégalaises.

6. Les explications personnalisées et circonstanciées de Mr C. notamment à l'audience ont permis de tenir pour établie son orientation sexuelle et les persécutions qui en ont résulté. Il a décrit de façon précise son entourage familial et ses conditions de vie durant son enfance et son adolescence. C'est de manière concrète qu'il a fait part de la prise de conscience de son homosexualité et des relations qu'il a entretenues avec des camarades de classe au cours de sa scolarité. Ses propos relatifs à la résolution de s conflit entre son orientation sexuelle et son éducation musulmane se sont révélés tout aussi pertinents et crédibles. En outre, il a apporté des indications précises sur les circonstances dans lesquelles son oncle et sa tante ont découvert son homosexualité, de même que sur ses conditions de vie actuelles, en particulier la manière dont il a rencontré d'autres hommes depuis son arrivée en France. A cet égard, il a spontanément cité le nom d'applications de rencontre qu'il utilise à cet effet...
La persistance de risques, actuellement pour les personnes homosexuelles au Sénégal, constituent un indice sérieux que le requérant puisse être persécuté en cas de retour dans son pays..."



La qualité de réfugié est reconnue  à Mr C...


cf aussi:

Somalie Protection subsidiaire Mogadiscio Eléments de vulnérabilité

 CNDA, 21 décembre 2021, n°21050783, 1ère section, 4ème chambre,


"...5. Les déclarations de Mr S.H, notamment au cours de l'audience publique devant la Cour, permettent de tenir pour établie sa nationalité somalienne, son appartenance au clan Ashraf, lesquelles ne sont au demeurant pas contestées par l'OFPRA, et sa provenance de Mogadiscio. Il a, en effet, fourni des indications précises sur son quartier et sa vie dans la capitale et il a su exposer avec clarté des éléments caractéristiques de son clan minoritaire Ashraf....

...12. Dans ces circonstances, il y a lieu de tenir compte de l'existence, le cas échéant, d'un indice sérieux de risque réel pour le requérant de subir des atteintes graves. En l'espèce, Mr. S.H. a su apporter des éléments précis et concrets sur sa situation personnelle permettant de considérer qu'il serait exposé à une menace grave et individuelle contre sa vie ou sa personne en cas de retour en Somalie. En effet, il peut être établi, au regard des ses déclarations à l'audience, qu'il se trouverait en cas de retour à Mogadiscio, dans un état de vulnérabilité du fait de son absence prolongée du pays, du jeune âge au moment de son départ et de sa situation d'isolement, et ce d'autant qu'il ne pourrait bénéficier de l'appui et la protection d'un clan majoritaire en cas de retour à Mogadiscio, étant issu d'un clan minoritaire..."


C'est donc la protection subsidiaire au titre de l'article L.512-1-3° qui lui est accordée.


Précision; l'intéressé était âgé de 15 ans au moment de son départ de Somalie, en 2008. Son épouse vit en Egypte, son père est décédé, sa mère vit au Kenya.


cf dans le même sens, CNDA, 5 mars 2021, n°20041198, https://denisseguinavocat.blogspot.com/2021/03/protection-subsidiaire-somalie_9.html


, cf aussi, CNDA, 23 juillet 2020, n°19047533

mercredi 22 décembre 2021

CNDA Jugement Minute Signature


Nous avions demandé l'aide juridictionnelle devant le Conseil d'Etat à la suite d'un jugement de la CNDA concernant un ressortissant afghan.

Par un arrêt du 21 décembre 2021, n°451230, Section du contentieux,10ème chambre, le Conseil d'Etat a jugé que:

"......................................................................................................................................................

Considérant ce qui suit:

1. Le dernier alinéa de l'article R.733-30 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce, dispose que: "La minute de chaque décision est signée par le président de la formation de jugement qui a rendu cette décision et par le secrétaire général de la cour ou par un chef de service".

2. Il ne ressort pas des pièces de la procédure devant la Cour nationale du droit d'asile que la minute de la décision attaquée comporte les signatures du président de la formation de jugement qui a rendu cette décision et du chef de service. Il s'ensuit que cette décision est entachée d'irrégularité. Dès lors, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, M. M...est fondé à  en demander l'annulation.

......................................................................................................................................................"

Note:

L'article R.733-30 est devenu l'article R.532-52 depuis le 1er mai 2021.

Cette décision du Conseil d'Etat est publiée sur le site Légifrance:

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000044558481?isSuggest=true


Cf également  CE, 24 janvier 2000, n°189812: "Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 25 du décret du 2 mai 1953 susvisé : "La minute de chaque décision est signée par le président de la formation de jugement qui a rendu cette décision et par le secrétaire général de la commission ou par un chef de section" ; qu'il ressort des pièces du dossier que la minute de la décision attaquée n'a pu être retrouvée au greffe de la commission où elle devait être conservée ; que, dès lors, en l'absence de cette pièce, le respect des dispositions susrappelées ne peut être présumé et que la décision attaquée doit être annulée ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer l'affaire devant la commission des recours des réfugiés ;"

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000008081525?isSuggest=true

lundi 20 décembre 2021

Tchad Excision Groupe social

 CNDA, 17 décembre 2021, 6ème section, 4ème chambre, n°20046184:"Les possibilités de protection pour les victimes de MGF au Tchad demeurent limitées, législation en vigueur n'étant pas appliquée. Ainsi, il peut être considéré que l'excision             s'apparente au sein des communautés arabes à une norme sociale et que les enfants et femmes non mutilées y constituent un groupe social au sens des stipulations précitées de la convention de Genève..."


cf également, CNDA, 5ème section, 3ème chambre,  12 janvier 2021 n°19010484, n°19010598, n°19010726:

"...5. Un groupe social est, au sens de l'article 1er A,2 de la convention de Genève précité, constitué de personnes partageant un caractère inné, une histoire commune ou une caractéristique essentielle à leur identité et à leur conscience, auxquels il ne peut leur être demandé de renoncer, et une identité propre perçue comme étant différente par la société environnante ou par les institutions. L'appartenance à un tel groupe est un fait social objectif qui ne dépend pas de la manifestation par ses membres, ou s'ils ne sont pas en mesure de le faire, par leurs proches, de leur appartenance à ce groupe.

6. Il en résulte que, dans une population dans laquelle les mutilations sexuelles féminines sont couramment pratiquées au point de constituer une norme sociale, les enfants non mutilés constituent de ce fait un groupe social. Dès lors, l'existence de ce groupe social ne dépend pas du nombre des personnes qui le composent mais du regard porté par la société environnante et les institutions sur les personnes appartenant à ce groupe, l'observation des variations des taux de prévalence des mutilations sexuelles féminines parmi les populations d'un pays, qui a pour seul objet de mesurer la présence et l'évolution de ce fait social objectif au sein de ces populations, permet d'établir, parmi d'autres facteurs géographiques, ethniques, culturels, sociaux ou familiaux, le lien éventuel entre cette persécution et l'appartenance au groupe social des enfants et des femmes non mutilées. ll appartient ainsi à une personne qui sollicite la reconnaissance de la qualité de refugiée en se prévalant de son appartenance à  ce groupe social de fournir l'ensemble des éléments circonstanciés, notamment familiaux, géographiques, sociologiques, relatifs aux risques qu'elle encourt personnellement de manière à permettre à l'OFPRA et, le cas échéant, au juge de l'asile d'apprécier le bien-fondé de sa demande.

7. Au Tchad, bien que les MGF soient pénalisées par la loi n°006/PR/2002 du 15 avril 2002 portant promotion de la santé de reproduction et l'article 318 du code pénal issu de la loi n°2017-01 du 8 mai 2017, la pratique perdure. En effet, si le rapport de novembre 2019 de l'organisation non gouvernementale 28 Too Many et l'Enquête démographique et de santé et à indicateurs multiples au Tchad (EDS-MICS) de 2014-2015 révélaient que les taux de prévalence des MGF avaient sensiblement diminué au Tcahd, les pratiques demeurent encore très répandues au sein de plusieurs communautés. Le taux de prévalence de l'excision est d'environ 38 % au niveau national mais varie considérablement selon les régions et les communautés, pouvant aller de 1 à 96 %. Il ressort en outre de l'enquête démographique et de santé à indicateurs multiples pour le Tchad de mai 2016 que le taux de prévalence de l'excision en milieu urbain plus particulièrement à N'Djamena est de 40 %. Toutefois, pour les tribus arabes, le taux de prévalence de l'excision est de  85,4 % et s'agissant de la région du Ouaddaï d'où le père de MMes H... et F... est originaire, celle-ci est l'une des régions au plus fort taux de prévalence des MGF avec un taux de 82 %. Selon un article de Radio France Internationale du 12 septembre 2020, intitulé "Bien qu'interdits, les cas d'excision se multiplient au Tchad", l'Eglise catholique tchadienne et la Commission nationale des droits de l'homme se sont alarmées de la recrudescence de la pratique des MGF dans le pays et de ce que "les autorités semblent se désintéresser du sujet", ayant "préféré la pédagogie à la sanction". De fait, le droit coutumier et le droit musulman s'appliquent concuremment avec le droit écrit, et régissent la plupart des aspects de la vie familiale et le statut de la femme, notamment les MGF...



dimanche 19 décembre 2021

Somalie Statut de réfugié Jilib Opinions politiques imputées Persécutions milices Al-Shabab

 CNDA, 1ère section, 1ère chambre, 17 décembre 2021, n°21045518:

".3. En premier lieu, les pièces du dossier ainsi que les déclarations circonstanciées et personnalisées faites en audience publique devant la Cour par Mr M.ont permis d'établir sa nationalité somalienne, sa provenance du Moyen-Djouba et de tenir pour fondées ses craintes de persécutions par la milice Al-Shabaab à son encontre à raison des opinions politiques qui lui sont imputées. En premier lieu, le requérant a livré des informations précises et corroborées par les cartes publiques disponibles, tant lors de son audition de l'Office qu'en audience devant la Cour, sur son environnement géographique, dont il a cité plusieurs villages des environs en rapport avec son histoire personnelle. L'appartenance du requérant au clan sheekhal (sheikhal)a pu également être établie au vu de la forte présence de ce clan à Jilib, selon les sources disponibles d'information, et au vu de ses explications précises, notamment sur les difficultés rencontrées avec la milice extrémiste Al-Shabaab par certains membres de ce clan qui a un statut religieux par héritage mais qui pratique un islam modéré soufi. Concernant son environnement sécuritaire, le requérant a décrit en des termes précis les conséquences sur la vie quotidienne de sa famille du contrôle de Jilib par la milice Al-Shabaab depuis 2007, qui est attesté par les sources publiques, notamment le rapport intitulé "Somalia-Southern regions" publié en septembre 2013 par Conflict Early Warning Reponse Unit (CEWERU)et les rapports du Bureau européen d'appui en matière d'asile (EASO) sur la situation sécuritaire en Somalie publiés successivement en 2014,2016,2017 et 2021, qui soulignent que Jilib est l'un des bastions de la milice de 2007 à ce jour.

4. En second lieu, le requérant a décrit en des termes précis les pressions exercées  par la milice Al-Shabaab sur les activités économiques de sa famille. Il a en outre exposé de façon personnalisée les circonstances dans lesquelles son frère aîné a été recruté de force par la milice et les recherches faites, en vain, par son père, désespéré pour tenter en vain de retrouver son fils aîné. Il a, en outre, exposé en termes convaincants ses profondes divergences avec la milice sur son rapport à la religion, la pratique d'un islam soufi par sa famille, opposée au fanatisme des Al-Shabaab. A cet égard, ses explications son apparues plausibles au vu des informations contextuelles issues notamment du rapport de l'EASO sur la Somalie centrale et méridionale de 2014 selon lequel "les Ashraf et les Sheikhal sont généralement respectés et protégés comme chefs religieux modérés par les clans parmi lesquels ils vivent". Il a ensuite rapporté en des termes précis et constants les circonstances dans lesquelles il a été recruté de force au début de l'année 2018 par des miliciens Al-Shabaab  ainsi que l'endoctrinement dont il  fait l'objet pendant les trois semaines suivantes. Les propos du requérant relatifs aux circonstances de sa fuite du camp en 2018, à la faveur d'un bombardement aérien contre son camp sont apparues plausibles au vu des informations contextuelles. A cet égard, en effet, les rapports du Bureau européen d'appui en matière d'asile (EASO) sur la situation sécuritaire en Somalie publiés en 2017 et 2021, indiquent que la majeure partie des incidents de sécurité dans le Moyen-Djouba, et dans le district de Jilib en particulier, sont liés à l'activité anti-insurrectionnelle ciblant la milice Al-Shabaab sous forme d'attaques aériennes des forces armées américaines. Enfin le requérant a fait valoir en termes convaincants ses craintes d'être victime de représailles en cas de retour en Somalie de la part de la milice Al-Shabaab en tant que déserteur. Sur ce point, les sources publiques, notamment le rapport EASO intitulé "Somalia-Target profiles", publié en septembre 2021, souligne que les insoumis et déserteurs des rangs d'Al-Shabaab sont exposés au risque d'exécution sommaire. Ainsi, il résulte de ce qui précède que Mr M.craint avec raison...d'être persécuté en cas de retour dans son pays en raison des opinions politiques qui lui sont imputées par la milice Al-Shabaab sans pouvoir bénéficier de la protection effective des autorités".

C'est donc le statut de réfugié qui est reconnu à notre client.


Denis SEGUIN

Avocat 

Docteur en droit

Spécialiste en droit des étrangers


OQTF étudiant Titre de séjour étudiant refus de renouvellement

 Concernant les refus de renouvellement  d'un titre de séjour étudiant, il "appartient au préfet saisi d'une demande tenant au renouvellement d'une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" de rechercher, à partir de l'ensemble du dossier, si l'intéressé peut être raisonnablement regardé comme poursuivant effectivement des études" (TA Nantes, 8ème chambre, 9 décembre 2021, n°2012658):

" 4. Il ressort des pièces du dossier que Mme E.a été inscrite, au titre de chacune des années universitaires 2016-2017, 2017-2018 et 2018-2019, au sein du parcours de formation d'une année permettant d'accéder aux études de santé, dénommé "PluriPASS", proposé au sein de l'université d'Angers. Pour l'année 2019-2020, elle a été inscrite en première année du cycle préparatoire  l'Ecole supérieure électronique de l'Ouest (ESEO) à Angers et elle s'y est de nouveau inscrite pour l'année universitaire 2020-2021, au titre de laquelle elle a sollicité la délivrance de la carte de séjour temporaire qui lui a été refusée par la décision en litige.

5. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des extraits précis et circonstanciés du dossier médical relatifs à l'hospitalisation de Mme E. du 24 au 27 juillet 2019 au sein de l'unité psychiatrique d'accueil et d'orientation du Centre de santé mentale d'Angers, que l'intéressée souffre, depuis plusieurs années, de dépression d'intensité moyenne à sévère, qui donné lieu, à compter du mois d'avril de l'année 2019, à un traitement qui n'a pas été efficace. Il ressort de ces mêmes pièces que la maladie de la requérante est en lien avec le climat familial, son père, domicilié au Maroc, exerçant des violences sur les membres de sa famille, dont la requérante, laquelle, pour s'extraire de ce cadre familial, a accepté de suivre des études dans le domaine médical imposé par son père, à qui elle a, par la suite, caché ses difficultés. Il ressort également des pièces du dossier que si, après ses trois échecs successifs dans le parcours de formation permettant d'accéder aux études de santé, elle s'est inscrite, au titre de l'année universitaire 2019-2020, en première année du cycle de préparation à l'école d'ingénieurs ESEO, qu'elle n'a pas validée,le directeur des études du groupe ESEO qu'elle a été autorisée par le jury à s'y inscrire de nouveau au titre de l'année universitaire 2020-2021 "compte tenu des problèmes de santé qu'elle a rencontrés" au cours de l'année universitaire précédente. Il ressort effectivement des pièces du dossier que Mme E. a développé, pendant plusieurs mois,des douleurs abdominales s'aggravant progressivement pour être, durant certaines périodes, presque permanentes, ces douleurs s'associant à une anorexie, déjà relevé lors de son hospitalisation du mois de juillet de l'année 2019, provoquant un amaigrissement de 7kg en un mois. Dans l'attestation précitée, le directeur des études du groupe ESEO, évoquant l'autorisation du jury de s'inscrire à nouveau en première année, accordée à  Mme E., précise que "cette décision du jury est rare, la réorientation directe est le cas classique, le jury a considéré que Mme E. présentait toutes les chances de réussir cette nouvelle année compte tenu de ses capacités intrinsèques". Or, il ressort des pièces du dossier, qu'à l'issue de l'année universitaire 2020-2021, Mme E., dont les enseignants soulignent les qualités, a validé sa première année avec les félicitations du jury, ce qui corrobore l'attestation du directeur des études du groupe ESEO concernant les capacités intrinsèques de l'intéressée à réussir le cycle préparatoire au sein de cette école.

Au regard de l'ensemble de ces circonstances particulières, les redoublements de la requérante et la stagnation de son parcours universitaire de 2016 à 2019 ne permettent pas de considérer qu'elle ne peut être raisonnablement regardée comme poursuivant effectivement des études. Par suite, la décision rejetant sa demande tendant au renouvellement de sa carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" repose sur un motif qui est entaché d'une erreur d'appréciation."



Le tribunal annule les décisions (refus et OQTF) et enjoint au préfet de Maine-et-Loire de délivrer la carte de séjour portant la mention étudiant.

jeudi 16 décembre 2021

Afghanistan Réfugié Afghans occidentalisés

Par une décision du 10 décembre 2021 (n°21038048, 1ère section 2ème chambre), la CNDA a jugé que:


"5. Cependant, il ressort des sources publiques disponibles, parmi lesquelles le rapport du Home Office britannique intitulé "Country Policy and Information Note.Afghanistan: afghans perceived as Westerneised" publié en janvier 2018, que la perception de la société afghane face aux retours d'afghans en Afghanistan après un séjour en Europe est variée. En effet, un élément central de cette perception découle de la réussite ou non de leur séjour en Europe et du fait qu'il s'agisse d'un retour volontaire ou forcé. De cette absence de réussite peut découler des stigmatisations et des discriminations de la part de la société afghane. Ce même rapport, ainsi que les rapports de l'European Asylum Support Office (EASO), intitulé "Country Guidance: Afghanistan" de décembre 2020 et "Afghans nationals perceived as "westernised", du 9 septembre 2020, celui du Home Office britannique, intitulé "Country Policy and Information Note.Afghanistan: unaccompanied children" publié le 16 avril 2021 et de l'organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR), publié le 26 mars 2021 et intitulé "Afghanistan: risques au retour liés à l'occidentalisation" relèvent que les afghans considérés comme occidentalisés s'exposent également à des risques de la part des taliban comprenant des menaces, agressions, des enlèvements et des persécutions du fait de leur séjour en Europe. Ils soulignent que leurs familles peuvent également être ciblées. En effet, une suspicion de conversion religieuse plane sur eux et ils sont perçus comme ayant adopté des valeurs européennes. Ainsi, ils sont accusés d'être des infidèles, des espions et des traitres. En outre, les craintes du requérant sont renforcées par le contexte prévalant, à la date de la décision, en Afghanistan, à savoir la prise de Kaboul par les taliban le dimanche 15 août 2021, corroborée par plusieurs sources publiques d'informations, tel que le communiqué de presse de l'Organisation non gouvernementale Human Rights Watch du 17 août 2021 titré "Afghanistan: les talibans au pouvoir" ou encore l'article de presse "Comment les talibans ont repris l'Afghanistan" publié le 17 août 2021 par le quotidien Le Monde. Enfin, un article publiée par l'agence Reuters, le 30 août 2021, fait état de ce que le porte-parole des talibans, interrogé sur le retour forcé des afghans déboutés de l'asile en Europe, a affirmé que les talibans étaient prêts à accepter le retour de ces personnes, mais que ces derniers supposés revenir en Afghanistan à la suite d'infractions commise en Occident, seraient alors jugés selon les préceptes de la Charia. Dès lors, l'occidentalisation manifeste du profil de Mr.Z; qui a quitté son pays en 2020, et a depuis résidé en Europe, notamment en Bosnie-Herégovine et en France, suffit, en l'espèce, à fonder des craintes de persécutions personnelles vis-à-vis des talibans, en cas de retour en Afghanistan. A cet égard, le requérant porte des marques visibles de son occidentalisation, lesquelles sont des éléments susceptibles de faire de lui, en plus de son jeune âge et de son séjour en Europe, une cible particulière en cas de retour dans son pays d'origine, en raison des opinions politiques et religieuses qui lui seraient imputées, de ce fait. Ainsi, il résulte de ce qui précède que Mr Z. s'expose à des persécutions de la part des taliban en cas de retour en Afghanistan en raison des opinions politiques et religieuses qui lui sont imputées. Dès lors, il est fondé à se prévaloir de la qualité de réfugié..."



cf aussi dans le même sens:

https://denisseguinavocat.blogspot.com/2022/01/afghanistan-refugie-afghans.html



A comparer avec une décision publiée le 30 décembre 2021 sur le site de la CNDA:

http://www.cnda.fr/content/download/186744/1798592/version/1/file/CNDA%2029%20novembre%202021%20M.%20A.%20n%C2%B021025924%20C%2B.pdf


lundi 13 décembre 2021

Titre de séjour parent enfant français Reconnaissance de paternité

Jugement TA Nantes, 2 décembre 2021, n°2012397:

"4. Si la reconnaissance d'un enfant est opposable aux tiers en tant qu'elle établit un lien de filiation et, le cas échéant, en tant qu'elle permet l'acquisition par l'enfant de la nationalité française, dès lors que cette reconnaissance a été effectuée conformément aux conditions prévues par le code civil, et s'impose donc à l'administration tant qu'une action en contestation de filiation n'a pas abouti, il appartient à l'autorité préfectorale, s'il est établi lors de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 6° de l'article L.313-11 du Ceseda, que la reconnaissance de paternité a été souscrite dans le but de faciliter l'obtention de la nationalité ou d'un titre de séjour de faire échec à cette fraude et de refuser, tant que la prescription prévue par les articles 321 et 335 du code civil n'est pas acquise, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la délivrance de la carte de séjour temporaire sollicitée par la personne se présentant comme mère d'un enfant français.


5. Il ressort des pièces du dossier que Mme BT a déclaré, dans le cadre de son audition, réalisée à la demande du préfet de Maine-et-Loire effectuée dans le cadre de la demande rejetée par la décision en litige, par un officier de police judiciaire le 1er juin 2020, que le père des enfants se trouvait au Gabon. Si cette déclaration tend à établir que M.B... n'est pas le père biologique des enfants N.et R., il ressort par ailleurs des pièces du dossier qu'ils ont vécu ensemble au Gabon y compris après la naissance des enfants et que la communauté de vie perdure en France et le préfet de Maine-et-Loire n'apporte par le moindre élément, ni même n'allègue, que Mr B..., quand bien même il a vécu et vit avec la requérante, n'aurait pas contribué à l'entretien et à l'éducation des enfants. Il ressort en outre des pièces du dossier que Mr B...a été déclaré comme étant le père des enfants dès le 24 décembre 2014, soit quatre jours après la naissance et plus de 2 ans avant le dépôt de la demande de visa d'entrée et de long séjour par Mme BT. Si cette déclaration ne vaut pas pour les enfants, conformément aux articles 415 et 418 du code civil gabonais reconnaissance de paternité dès lors qu'elle n'a pas été effectué par Mr B...lui-même mais par leur mère, ce dernier a reconnu les enfants le 11 mai 2017 auprès de l'officier de l'état civil du consulat général de France à Libreville. Certes, plus de deux années séparent la naissance des enfants et leur reconnaissance paternelle, mais comme cela a déjà été relevé, d'une part Mme BT a elle-même déclaré dès le 24 décembre 2014 Mr B... comme le père des enfants, d'autre part, elle a vécu ) ses côtés avec ces enfants. Enfin, si le procès-verbal de l'audition de Mr B...indique que '2015" correspond à l'année de sa rencontre avec Mme BT, ce même document précise par ailleurs que l'intéressé a reconnu les enfants en 2014, ce qui corrobore la déclaration effectuée par la requérante le 24 décembre 2014 concernant l'identité du père des enfants. Au regard de l'ensemble de ces éléments, la reconnaissance de paternité ne peut être regardée comme ayant été effectuée par Mr B...dans le but de faciliter la délivrance d'un titre de séjour à Mme VT en qualité de parent d'enfant français et par suite comme révélant une fraude auquel il aurait appartenu à l'autorité administrative de faire échec, en rejetant la demande de titre de séjour. Par suite, cette dernière est fondée à soutenir que le décision attaquée repose sur sur un motif entaché d'erreur d'appréciation".

Annulation du refus de renouvellement du titre de séjour et injonction de délivrer une carte de séjour mention vie privée et familiale.




mercredi 8 décembre 2021

Interdiction de retour sur le territoire français (IRTF)

Au visa des articles L.612-7 et L.612-10 du Ceseda, le Tribunal administratif de Grenoble (2ème chambre) a jugé par un jugement du 30 novembre 2021, n°2105000 que:

§ 12. "...la durée de l'interdiction de retour doit être décidée au regard des 4 critères mentionnés à l'article L.612-10 du code précité, à savoir la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, l'existence ou non d'une mesure d'éloignement antérieure et le fait que sa présence en France représente une menace pour l'ordre public...


§14. ...L'interdiction de retour ne répond pas aux 4 critères énumérés. Dans le cas d'espèce, le préfet de l'Isère relève que l'intéressé ne représente pas une menace pour l'ordre public tout en indiquant que celui-ci a été interpellé pour usage illicite de stupéfiants ainsi que pour vol simple, puis interpellé pour port sans motif légitime d'arme blanche. Cette contradiction dans la qualification du critère relatif à l'ordre public et le non cumul des 4 critères prévus à l'article L.612-10 du code précité démontrent l'absence de prise en compte de la situation de Mr F...Il a par suite commis une erreur de droit...".



L.612-7:

"Lorsque l'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative édicte une interdiction de retour. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour.
Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français".


L.612-10:

"Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français".
Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11.





vendredi 12 novembre 2021

Réfugié Afghanistan Armée afghane Chauffeur

Mr Z.avait exercé la profession de chauffeur pour le compte de l'armée afghane de 2003 à 2009. Il avait ensuite exercé la fonction de chauffeur de taxi, et contraint de transporter des armes pour le compte de talibans. En 2015, après avoir refusé de transporter un colis, il a reçu un appel de son oncle l'informant que les talibans étaient à sa recherche.

Selon la CNDA (CNDA, 12 novembre 2021, n°21034843, 6ème section, 1ère chambre): "...les déclarations de l'intéressé ont permis de tenir pour établie sa provenance de la province de Paktya...En second lieu, il ressort de l'instruction et des déclarations de l'intéressé faites durant l'audience publique que les fais présentés comme ayant été à l'origine de son départ d'Afghanistan peuvent être tenus pour établis. En effet, il est revenu de manière circonstanciée sur son parcours, et notamment sur son emploi de chauffeur pour le compte de l'armée afghane et sur son activité de chauffeur de taxi. Par ailleurs, ses déclarations orales cohérentes permettent de tenir pour établi qu'en 2015, il a eu à transporter, sous la contrainte, un colis pour le compte d'insurgés. Il a évoqué de manière personnalisée les éléments qui l'ont conduit à refuser de rendre à nouveau un tel service. Il a restitué en termes consistants les recherches menées à son encontre, notamment à son domicile. Ainsi, il résulte de ce qui précède que Mr Z.craint avec raison, au sens des stipulations précitées de la convention de Genève, d'être persécuté en cas de retour dans son pays en raison d'opinions politiques imputées, pour s'être opposé à des talibans. Les craintes du requérant apparaissent en outre renforcées par la prise de Kaboul par les forces talibanes le 15 août 2021, ces dernières disposant depuis lors de l'ensemble de l'appareil étatique pour poursuivre ceux qu'ils perçoivent comme des opposants à leur régime. Dès lors, il est fondé à se prévaloir de la qualité de réfugié...".



Denis SEGUIN

Docteur en droit

Avocat spécialiste en droit des étrangers




dimanche 7 novembre 2021

Somalie Protection subsidiaire Mineur départ de Somalie

 Selon la CNDA (CNDA, 5 novembre 2021, n°21033580):"

"Le bien fondé de la demande de protection de Mr AS doit également être apprécié au regard du contexte prévalant à Mogadiscio et dans la région du Bénadir, seul point d'entrée en cas de retour en Somalie.

.....................................................................................................................................................

Mr AS qui a quitté la Somalie en 2017 , alors qu'il était mineur, n'a plus aucun contact avec les membres de sa famille et ne dispose d'aucun soutien de quelque nature que ce soit dans son pays d'origine. Eu égard à ces éléments de vulnérabilité, propres à sa situation et son parcours personnels, le requérant doit être regardé comme étant personnellement exposé à une menace grave et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence aveugle résultant d'une situation de conflit armé interne, au sens des dispositions de l'article L.512-1-3° précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans pouvoir se prévaloir de la protection effective des autorités. Ainsi, Me AS doit se voir accorder le bénéfice de la protection subsidiaire".

Somalie clan Sheikhal Moyen-Juba Protection subsidiaire

Après avoir rejeté la demande de statut de réfugié, la CNDA a jugé que (CNDA, 22 octobre 2021, n°21031596):

"En second lieu, le bien-fondé de la demande de protection de Mme MH doit également être apprécié au regard du contexte prévalant dans son pays, en particulier dans le Moyen-Juba où elle résidait, à Mogadiscio, probable point d'entrée en cas de retour en Somalie, et dans le Bas-Chébéli, région qu'elle devrait traverser pour atteindre sa région d'origine.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que cette violence aveugle prévalant actuellement dans le centre et le sud du pays, notamment dans les régions de Bénadir et du Bas-Chébeli que la requérante devrait traverser pour atteindre sa région d'origine, n'atteint pas un niveau si élevé qu'il existe des motifs sérieux et avérés de croire que chaque civil qui y retourne court, du seul fait de sa présence dans cette région, un risque réel de menace grave contre sa vie ou sa personne, au sens des dispositions précitées du 3° de l'article L.512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cependant, Mme MH doit être regardée comme étant exposée à un tel risque en raison de sa vulnérabilité résultant de son impossibilité de bénéficier du soutien et de la protection de son clan qui est minoritaire dans son pays. En outre, plusieurs sources publiques, notamment le rapport du ministère de l'Intérieur britannique (Home Office), intitulé "Somalia (South and Central); Security and humanitarian situation", publié en novembre 2020, précisent que les femmes sont particulièrement vulnérables dans les régions touchées par le conflit armé en Somalie. Dès lors, la requérante est fondée à se prévaloir du bénéfice de la protection subsidiaire prévue par le 3° de l'article L.512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile".

Somalie Réfugié District de Merka Moyen-Shabelle groupe Makane

La Cour nationale du droit d'asile a relevé que Monsieur MJ (CNDA, 22 octobre 2021, n°21029548), était de "nationalité somalienne, du groupe minoritaire des Makane et originaire du Moyen-Chébéli (Moyen-Shabelle). Ses déclarations suffisamment précises, personnalisées et crédibles ont également permis d'établir qu'en 2010, des combattants d'Al-Shabab ont tenté de l'enrôler. Dans ce contexte, après avoir subi des pressions de leur part ainsi que de la part de l'un de ses frères qui avait accepté de rejoindre leurs rangs, il a été contraint de fuir son pays. Ses explications sont compatibles avec les informations contenues notamment dans le rapport du Bureau européen d'appui en matière d'asile sur la Somalie, publié en août 2014 qui indique que "les hommes qui refusent d'être enrôlés fuient le territoire d'Al-Shabab par crainte de représailles ou d'enrôlement forcé". Enfin, il ressort du rapport de la même institution sur la situation sécuritaire en Somalie, publié en septembre 2021, qu'Al-Shabab reste fortement implanté dans la région du Moyen-Chébéli dont le requérant est originaire, surtout dans les zones rurales. Ainsi, en cas de retour dans son pays, Monsieur MJ craint avec raison, au sens des stipulations précitées de la convention de Genève, d'être persécuté par Al-Shabab en raison des opinions politiques qui lui sont imputées, liées à son refus d'être enrôlé. Dès lors, il est fondé à se prévaloir de la qualité de réfugié".

mardi 19 octobre 2021

Titre de séjour salarié Refus adéquation qualification, expérience, diplôme et caractéristiques de l'emploi

 Au visa des articles L.313-10 (ancien) du Ceseda et R.5221-11  du code du travail, le Tribunal administratif de Nantes annule un refus de de titre de séjour salarié, refus motivé par l'inadéquation entre le cursus d'études et les caractéristiques de l'emploi proposé (TA Nantes, 15 octobre 2021, n°2006609).

"4.Il ressort des pièces du dossier, alors que Mr N.se prévaut d'une proposition de contrat à durée indéterminée par l'entreprise "P..."pour un poste d'agent de sécurité, l'intéressé s'est vu délivrer plusieurs titres de séjour portant la mention étudiant afin de suivre des études de droit et qu'il était inscrit à l'Université d'Angers de 2017 à 2020, en Master Droit public général, en master 2 Droit des interventions publiques, puis à l'institut d'études judiciaires en vue de préparer l'examen d'entrée au Centre Régional de Formation Professionnelle des Avocats (CRFPA) et que cette formation, comme l'a relevé le préfet, ne présente pas d'adéquation , eu égard à sa nature, avec les caractéristiques de l'emploi proposé au requérant.

5. Toutefois, la circonstance qu'un étranger ait exercé son activité dans le cadre d'un emploi sous couvert d'un titre de séjour étudiant l'autorisant à travailler à titre accessoire en permet pas d'écarter l'expérience acquise au titre de cet emploi de l'appréciation de l'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule prévue par le 2° de l'article R.5221-20 du code du travail.

6. Il ressort des pièces du dossier que Mr N.est titulaire, depuis le 11 mars 2019, d'un certificat de qualification professionnelle d'agent de prévention et de sécurité et qu'il a commencé à occuper, dans les limites permises par son titre de séjour "étudiant", un emploi d'agent de sécurité auprès de la société Aegis Sécurité au mois de mai 2019. Il justifie ainsi, à la date de la décision attaquée, d'une expérience acquise justifiant d'une adéquation suffisante entre son profil et les fonctions au titre desquelles il a sollicité un titre de séjour en qualité de salarié, alors même que cette qualification a été acquise, non dans le cadre de ses études, dont le préfet ne conteste d'ailleurs pas le caractère sérieux, mais dans le cadre de l'activité professionnelle qu'il a exercée à titre accessoire. Dans ces conditions, Mr N.est fondé à soutenir que le préfet de Maine-et-Loire a commis une erreur de droit dans l'application de l'article L.311-10 en lui refusant la délivrance du titre de séjour en litige".

L'arrêté du préfet est annulé et il est enjoint au préfet de Maine-et-Loire de délivrer un titre de séjour portant la mention "salarié" dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

L'Etat est condamné à nous verser la somme de 1200 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du CJA et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.


cf aussi CE, 8 juin 2016, n°389115:

"3. Considérant qu'il résulte des dispositions du 2° de l'article R. 5221-20 du code du travail que l'octroi de l'autorisation de travail suppose d'apprécier l'adéquation entre d'une part la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'intéressé, et d'autre part, les caractéristiques de l'emploi auquel il postule ; qu'est, à cet égard, sans incidence la circonstance que ces diplômes ou cette expérience ont été obtenus en France ou à l'étranger ; qu'en outre, il est loisible à un ressortissant étranger de faire valoir une expérience professionnelle alors même qu'elle a été acquise au titre d'un emploi accessoire exercé sous couvert d'un titre de séjour étudiant, que le préfet peut prendre en compte, comme toute autre expérience professionnelle, pour déterminer l'adéquation de l'expérience professionnelle de l'intéressé avec les caractéristiques de l'emploi auquel il postule ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que le 2° de l'article R. 5221-20 du code du travail ne distinguait pas entre les diplômes et l'expérience obtenus en France et à l'étranger et qu'il convenait, en conséquence, de prendre en compte un diplôme acquis dans le pays d'origine pour apprécier l'adéquation avec l'emploi auquel l'étranger postulait, la cour administrative d'appel de Versailles n'a pas commis d'erreur de droit ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'en jugeant que le préfet ne pouvait refuser l'autorisation de travail sollicitée au seul motif que l'expérience de l'intéressé avait été acquise dans le cadre d'un emploi accessoire, sans lien avec les études poursuivies en France, la cour n'a ni commis d'erreur de droit, ni dénaturé les faits de l'espèce ;".



mardi 28 septembre 2021

Sénégal Homosexualité Statut de réfugié

CNDA 24 septembre 2021, n°21 01 45 29 

 "...Un groupe social est, au sens des dispositions de la Convention de Genève constitué de personnes partageant un caractère inné, une histoire commune ou une caractéristique essentielle à leur identité et alors conscience auquel il ne peut leur être demandé de renoncer et une identité propres perçu comme étant différente par la société environnante ou par les institutions. En fonction des conditions qui prévalent dans un pays, des personnes peuvent, en raison de leur orientation sexuelle, constituer un groupe social au sens de c'est disposition. Il convient, dès lors, dans l'hypothèse où une personne sollicite le bénéfice du statut de réfugié en raison de son orientation sexuelle, d'apprécier si les conditions existant dans le pays dont elle a la nationalité permettent d'assimiler les personnes se revendiquant de la même orientation sexuelle un groupe social du fait de regard que porte sur ces personnes la société environnante où les institutions et dont les membres peuvent craindre avec raison d'être persécution être persécuté du fait même de leur appartenance à ce groupe. Il résulte de ce qui précède que l'octroi du statut de réfugié du fait de persécutions liées à l'appartenance à un groupe social fondée sur une orientation sexuelle commune ne saurait être subordonné à la manifestation publique de cette orientation sexuelle par la personne qui sollicite le bénéfice du statut de réfugié. D'une part, le groupe social n'est pas institué par ceux qui le composent, ni même du fait de l'existence objectif de caractéristiques qu'on leur prête mais par le regard que porte sur ces personnes la société environnante ou les institutions. D'autre part, il est exclu que le demandeur d'asile doivent, pour éviter le risque de persécution dans son pays d'origine, dissimuler son homosexualité où faire preuve de réserves dans l'expression de son orientation sexuelle. L'existence d'une législation pénale qui réprime spécifiquement les personnes homosexuelles permet de constater que ces personnes doivent être considéré comme formant un certain groupe social. L'absence d'une telle législation ne suffit pas à établir que ces personnes ne subissent pas de persécution en raison de leur orientation sexuelle. Des persécutions peuvent en effet être exercées sur les membres du groupe social considéré sous couvert de dispositions de droit commun abusivement appliqué on part des comportements émanant des autorités ou encourager favoriser ou même simplement tolérer par celle-ci.

 Dès lors que le paragraphe 3 de l'article 319 du code pénal sénégalais punit d'une peine de prison allant d'un an à 5 ans et d'une amende comprise entre 100000 et 1500000 francs CFA, quiconque aura commis un acte impudique ou contre nature avec un individu de son sexe, les personnes homosexuelles constituent au Sénégal un groupe social au sens de la Convention de Genève. 

Il ressort par ailleurs de l'ensemble des sources publiques disponible, comme le rapport du département d'État des États-Unis sur la pratique des droits de l'homme au Sénégal de 2019, le guide de l'information établi en 2017 par le ministère Canadien de l'immigration, de la diversité et de l'inclusion sur les réalités juridique et sociale des minorités sexuelles dans les principaux pays d'origine des personnes nouvellement arrivé au Québec ou bien encore le rapport intitulé les droits humains en Afrique, rétrospective 2019, publié par un Amnesty international le 8 avril 2020 que les dispositions pénales répressives sont effectivement appliquées au Sénégal. Les personnes homosexuelles ils sont l'objet de manifestations d'hostilité, date homophobe et de graves violences de la part de la population ainsi que d'importantes discriminations, l'homosexualité étant largement tabou au sein de la société sénégalaise. À ce titre le rapport d'Amnesty International relève qu'en 2019, le Sénégal a réaffirmé devant le comité contre la torture qu'il ne dépénaliserait pas les actes contre nature, - 11 personnes ont été arrêtés en raison de leur identité de genre ou de l' orientation sexuelle, réel ou présumé, dont 9 ont été condamnées à des peines allant de 6 mois à 5 ans d'emprisonnement et que les défenseurs des droits humains qui se mobilisent en faveur des droits des lesbiennes des gays et des personnes bisexuelle transgenre ou intersexe  ont été victimes de campagne de dénigrement et de menaces de mort, craignant pour leur sécurité plusieurs ont dû fuir le pays enfin, les personnes homosexuelles ne peuvent se prévaloir de la protection des autorités celle-ci réprimant elle-même leur orientation et étant par ailleurs auteurs de violences et de nombreux abus. Ainsi l'ensemble de ces éléments permet de considérer que les personnes homosexuelles sont susceptibles d'être exposées au Sénégal à un risque de persécution en raison de leur orientation sexuelle...".


cf aussi:






mardi 21 septembre 2021

OQTF Mineur pris en charge par l'ASE (aide sociale à l'enfance)

Le Tribunal administratif de Nantes, par jugement du 17 septembre 2021, n°2006802 annule un refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français, concernant un mineur pris en charge par l'Aide sociale à l'enfance (ASE), pour les motifs suivants, au visa de l'article L.423-22 du Ceseda:

".3. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour de plein droit portant la mention 'vie privée et familiale", présentée sur le fondement des dispositions précitées, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L.311-3 du Ceseda, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de 16 ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, il ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française.

4. L'arrêté en litige, après avoir décrit la situation en France de Mr F.et mentionné la scolarité en France de l'intéressé et l'avis de la structure d'accueil, se borne à retenir, pour conclure que le requérant "ne remplit pas les conditions d'admission au service sur le fondement de l'article L.313-11-2bis nonobstant sa prise en charge par les services de l'ASE", que Mr F.ne justifie pas du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, au constat des absences répétées au collège de ce dernier, du caractère trop irrégulier de son travail scolaire et de l'absence de viabilité de son projet d'apprentissage. A supposer que le préfet de Maine-et-Loire ait entendu ainsi invoquer une insuffisance insertion de l'intéressé dans la société française, il ne ressort pas des termes de l'arrêté contesté qu'il aurait pris en compte les liens de l'intéressé avec sa famille dans son pays d'origine. Par suite, le préfet de Maine-et-Loire qui n'a pas procédé à un examen global de la situation de Mr F., a entaché sa décision d'une erreur de droit. L'intéressé est par suite fondé à demander pour ce motif l'annulation, qu'aucun autre moyen n'est susceptible de justifier, du refus de séjour litigieux ainsi que, par voie de conséquence, celle des décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.".

L'arrêté est annulé et il est enjoint au préfet de réexaminer la demande de titre de séjour.




Voir aussi:


CAA Lyon, 5 mars 2019, n°18LY02168:

"6. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour de plein droit portant la mention "vie privée et familiale", présentée sur le fondement des dispositions citées au point 4, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L. 311-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, il ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française".



"Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1.

Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française".







Denis SEGUIN

Docteur en droit

Avocat spécialiste en droit des étrangers et de la nationalité


mercredi 15 septembre 2021

Refus de séjour et OQTF annulation article 8 cedh, 20 ans de présence en France

Par un jugement du 15 septembre 2021 n°2008762, le Tribunal administratif de Nantes annule un refus de séjour et donc l'obligation de quitter le territoire français du 5 août 2020 concernant un ressortissant camerounais, entré en France à l'âge de 12 ans.


Le tribunal a visé les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

§3. "Il ressort des pièces du dossier que Mr A.S est entré sur le territoire français à l'âge de 12 ans et s'y est maintenu, qu'il y a bénéficié d'une carte de séjour temporaire, le 23 janvier 2009, à l'âge de 20 ans renouvelée, jusqu'au 21 février 2013. Il en ressort également que si le préfet de Maine-et-Loire soutient, sans être contesté que la demande de renouvellement de sa carte de séjour, formulée par le requérant en 2013, a été classée sans suite faute pour Mr A.S d'avoir complété son dossier, l'intéressé fournit la preuve de sa présence en France du 1er janvier 2014 au mois de juin 2019, en produisant notamment les bulletins de paie délivrés par ses employeurs successifs et couvrant toute cette période. Il ressort en outre des pièces du dossier que la mère du requérant est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 24 août 2021. Enfin, au surplus, et bien que le requérant n'ait reconnu cet enfant que le 18 août 2020, soit après la date d'édiction de la décision attaquée, il ressort des pièces du dossier, notamment de l'acte de naissance produit, et il n'est pas contesté, que Mr A.S est père d'un enfant né le 16 novembre 2019 de son union avec une ressortissante française et qu'il allègue sans être contesté par le préfet, entretenir des relations régulières avec cet enfant. Ainsi, dans les circonstances particulières de l'espèce, compte tenu de sa présence en France depuis l'âge de 12 ans, soit depuis près de vingt ans à la date de la décision attaquée, de sont insertion professionnelle et familiale en France, Mr A.S est fondé à soutenir que la décision attaquée refusant le renouvellement de son titre de séjour a porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et a ainsi méconnue les stipulations de l'article 8  de la la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales".

Le tribunal annule le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français et enjoint au préfet de délivrer un titre de séjour mention "vie privée et familiale" dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement (.§5: "l'exécution du présent jugement implique nécessairement, eu égard au motif d'annulation, que Mr A.S soit admis au séjour..."). 

L'Etat est en outre condamner à nous verser  la somme de 1200 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.



Denis SEGUIN

Docteur en Droit

Avocat spécialiste en Droit des étrangers et de la nationalité




dimanche 29 août 2021

Réfugié Afghanistan officier de l'armée nationale afghane (ANA)

CNDA 18 août 2021, n°19024921 

S'agissant d'un ancien officier formateur de l'armée nationale afghane (ANA), fonctions établies et non contestées par l'OFPRA:


 "...Le requérant s'est montré en mesure de retracer en détail son parcours professionnel, ses différentes nominations et d'expliciter sa volonté de demeurer au poste de formateur après avoir suivi différentes formations auprès des forces américaines et françaises alors présentes à Kaboul. A ce titre, le rapport du Bureau européen en matière d'asile publié en décembre 2017, intitulé "COI Report Afghanistan Individuals targeted by armed actor in the conflict" et toujours d'actualité affirme que le ciblage des représentants du gouvernement et des fonctionnaires par les insurgés dépend de plusieurs éléments et notamment du lieu où l'individu travaille ou a travaillé, de son lieu d'origine, de son grade, de sa position sociale. Certains organes de l'Etat afghan et notamment les ministères de la Défense, sont des cibles prioritaires des groupes insurgés. Ce rapport relève que les bureaux du ministère de la Défense dont dépend le KTMC et son personnel sont régulièrement la cible d'attaques... 
...................................................................................................................................................
Le HCR appelle l'attention des Etats sur les individus relevant de l'un des profils à risque qu'il énumère et qui peuvent nécessiter une protection internationale, citant en particulier les individus liés ou perçus comme étant favorables au gouvernement et à la communauté internationale, forces armées internationales incluses.
....................................................................................................................................................

Le HCR relève également que les familles de tous les profils mentionnés peuvent être ciblées en représailles sur le principe de "culpabilité par association". Ils sont sujets au harcèlement, aux enlèvements, à la violence et aux assassinats. Dans le même sens, le rapport de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés sur les profils à risque en Afghanistan publié le 20 septembre 2020 indique que depuis la signature d'un accord entre les talibans et les Etats-Unis le 29 février 2020, les forces de sécurité afghanes ont été les pincipales cibles d'attaques menées par les talibans. Enfin selon une note de la Commission de l'Immigration et du statut de réfugié du Canada, intitulée "Afghanistan: information indiquant si les talibans ont la capacité de poursuivre des personnes qui ont déménagé dans une autrerégion: information sur leur capacité de retrouver des personnes à long temre: information sur la capacité des talibans à réaliser des assassinats ciblés (2012-janvier 2016)", les talibans ont mis en place des structures et tissés des liens étroits tant au sein de la police que de l'administration pour pister et retrouver des personnes qu'ils recherchent."


C'est le statut de réfugié qui est reconnu en raison des risques de persécution par les talibans pour opinions imputées.

Une décision rendue quelques jours avant la prise de pouvoir par les talibans...

samedi 31 juillet 2021

Afghanistan Nangarhar Protection subsidiaire

Par décision du 2 juillet 2021 (n°21102301), la CNDA accorde le bénéfice de la protection subsidiaire à un ressortissant afghan originaire de la province de Nangarhar, au motif notamment que le rapport du BEAA de septembre 2020 se réfère aux données de l'Armed Conflict Location and Event Data qui relève 700 incidents violents entre le 1er mars 2019 et let 30 juin 2020 et que le Nangarhar est l'une des provinces les plus affectées en Afghanistan par le conflit armé. 

dimanche 11 juillet 2021

Mariage ou naissance après une OQTF

 C'est un schéma assez classique.

Une personne étrangère a conclu un PACS avec une personne de nationalité française. Elle demande la délivrance d'un titre de séjour en tant que concubin d'une personne française.

La préfecture refuse au motif que le PACS est récent. Elle refuse avec un OQTF (obligation de quitter le territoire français).

Un recours est formé devant le Tribunal administratif.

En cours de procédure, les personnes concernées se marient. Et le conjoint de français a droit à un titre de séjour précisément en sa qualité de conjoint de français (étant précisé qu'il faut quand même un visa de long séjour sauf cas particulier).

Attention: le mariage postérieur à l'OQTF est sans incidence sur la légalité de la décision. Mais il peut être de nature à faire obstacle à l'exécution de la mesure d'éloignement.

Le contentieux est ce que l'on appelle le contentieux de l'excès de pouvoir: le juge peut tenir compte de circonstances intervenues postérieurement à la décision attaquée, mais pour constater qu'elle n'est plus susceptible d'être exécutée (CE, 21 mars 2001, n°208541: https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000008065522).


Concrètement, même si le recours contre l'OQTF est sans résultat, il est possible de présenter une nouvelle demande en tant que conjoint de français.


Pour des circonstances telles que la naissance d'une enfant français après l'OQTF, cf CE, 7 avril 2006, n°274713, CE, 30 juin 2012, n°346073: https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000026052826

Attestation de demande d'asile après une OQTF

Notre client avait reçu une OQTF (obligation de quitter le territoire français) quelques temps après avoir passé la frontière lors d'un contrôle en train. Une OQTF avait été émise au motif qu'il était en situation irrégulière sur le territoire français.

Après cette OQTF, il a présenté une demande d'asile et a reçu une attestation de demande d'asile.

Le Tribunal administratif de Montpellier  (TA Montpellier, 7 juillet 2021, n°2102489 et 2102490)qui avait été saisi du recours contre l'OQTF a jugé que:

"La délivrance de [l'attestation de demande d'asile]qui vaut autorisation provisoire de séjour, a eu pour effet implicite mais nécessaire d'abroger les décisions faisant obligation de quitter le territoire français sans délai  de départ volontaire en fixant le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français..."


Précisions que l'abrogation ne vaut que pour l'avenir (contrairement au retrait qui a pour effet de supprimer rétroactivement une décision).


cf dans le même sens:

CAA Versailles, 3ème chambre, 18 juin 2019, n°18VE02211

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000038650449




Denis SEGUIN

Avocat spécialiste en droit des étrangers et de la nationalité







dimanche 4 juillet 2021

Tchad ,Statut de réfugié, militant du FACT, unité de famille



Décision CNDA du 15 juin 2021 n°19026318, 19026319, 19029650:

"Le requérant a livré  lors de l'audience laquelle s'est tenu à huis clos un récit personnalisé et circonstancié de la dégradation de ses relations avec des connaissances proche du pouvoir après la création du FACT (Front pour l'alternance et la concorde au Tchad).

De même il a tenu des propos concret quand à l'aide financière apportée à deux de ses cousins afin qu'il rejoigne ce mouvement, le requérant précisant qu'il ne s'était pas engagé de manière visible et affirmée par crainte de représailles. Invité à préciser la raison de son départ du pays, il a mis en avant les pressions exercées à l'encontre de son père le conduisant à se servir de ses problèmes de santé pour pouvoir quitter le pays sans encombre. 
Par ailleurs, il a développé de manière tangible et personnalisée son engagement en faveur du FACT postérieurement à son départ du pays et la visibilité de son militantisme à cet égard. À ce titre il a produit à l'appui d'une note en délibéré des éléments probants sur ces prises de position publique en faveur du FAC T, fustigeant la gestion du Tchad par le gouvernement de débit. Ainsi  eu égard  à la situation politique actuelle du Tchad... Il résulte de ce qui précède que Monsieur I... craint avec raison au sens des stipulations de Genève d'être persécuté en cas de retour dans son pays d'origine en raison de ses opinions politiques.

Les principes généraux du droit applicables aux réfugiés, résultant notamment des stipulations de la convention de Genève, imposent, en vue d'assurer pleinement au réfugié la protection prévue par ladite convention, que la même qualité soit reconnue à la personne de même nationalité qui était unie par le mariage à un réfugié à la date à laquelle celui-ci a demandé son admission au statut de réfugié ou qui avait avec lui une liaison suffisamment stable et continue pour former avec lui une famille.
Mme F...s'est mariée avec Mr I...le 15 août 2015. Son époux, de même nationalité s'est vu reconnaître le statut de réfugié...Dès lors Mme F...est fondée à  demander que la qualité de réfugiée lui soit reconnue sur le fondement du principe de l'unité de famille."


Denis SEGUIN
Avocat spécialiste en droit des étrangers et de la nationalité

samedi 3 juillet 2021

Titre de séjour "parent enfant français" et reconnaissance de paternité, fraude, absence de preuve de la fraude

 

Jugement du Tribunal administratif de Nantes, 31 mai 2021, n°2012397

".. Si la reconnaissance d'un enfant est opposable aux tiers, en tant qu'elle établit un lien de filiation et, le cas échéant, en tant qu'elle permet l'acquisition par l'enfant de la nationalité française, dès lors que cette reconnaissance a été effectuée conformément aux conditions prévues par le Code civil, et s'impose donc en principe à l'administration temps qu'une action en contestation de filiation n'a pas abouti, il appartient néanmoins au préfet, s'il si est établi, lors de l'examen d'une demande de titre de séjour présenter sur le fondement du 6e de l'article L 313 - 11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que la reconnaissance de paternité a été souscrite dans le but de faciliter l'obtention de la nationalité française ou d'un titre de séjour, de faire échec à cette fraude et de refuser, tant que la prescription prévu par les articles 321 et 335 du Code civil n'est pas acquise, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la délivrance de la carte de séjour temporaire sollicité par la personne se présentant comme père ou mère d'un enfant français. 

Il ressort des mentions de la décision contestée que le préfet de Maine-et-Loire a rejeté la demande de renouvellement du titre de séjour de Madame B au motif que la reconnaissance de paternité des enfants de l'intéressé présentait un caractère frauduleux .

 Toutefois si les déclaration de Madame B...et Monsieur B... recueillies par les services de la gendarmerie nationale laissent supposer que Monsieur B... pourrait ne pas être le père biologique des enfants, aucun élément ne permet de regarder la reconnaissance de paternité de ses enfants comme ayant été faite par Monsieur B...dans le but de faciliter l'obtention de la nationalité française ou d'un titre de séjour par Madame B..., ou à toute autre fin constitutive d'une fraude à la loi, ce qui ne serait être déduit du seul écart d'âge important entre Madame B...et Monsieur B... ,alors au demeurant qu'aucun indice susceptible de remettre en cause leur communauté de vie n'a été relevé par les services de la gendarmerie nationale à l'occasion d'une visite domiciliaire réalisée le premier juin 2020"...


 Il ne suffit pas à l'administration d'invoquer des soupçons. Si elle allègue une fraude, elle doit la prouver.

  La préfecture avait effectué un signalement au procureur de la République (en application de l'article 40 du code de procédure pénale), lequel avait ordonné une enquête.



Denis SEGUIN

Avocat spécialiste en droit des étrangers et de la nationalité




mercredi 5 mai 2021

Statut de réfugié Libye


CNDA, 16 avril 2021, n°20017210 et 20017211


 "...4. En premier lieu, les pièces du dossier et les déclarations tenues en audience publique ont permis à la Cour de tenir pour établies, à l'instar de l'Office, leur nationalité libyenne, leur provenance de la ville de Saba ainsi que leurs activités professionnelles. En effet, l'ensemble de leurs déclarations précises à ce sujet ont été corroborées par le versement aux débats de leurs passeports, de leurs actes de naissance et de leur acte de mariage. De même, la filiation de Mme A...avec le général A.A..., ancien chef des services de renseignement libyens, qui n'avait pas été contestée par l'Office, a fait l'objet de propos étayés et circonstanciés de la part des requérants et doit être considérée comme avérée. En particulier, Mme A...a livré devant la Cour de nombreux éléments contextualisés permettant de comprendre les circonstances du retour de son père à des postes de responsabilités dans l'administration libyenne après une période d'inactivité de plusieurs années.

5.En deuxième lieu, leurs explications détaillées et circonstanciées permettent d'établir les faits à l'origine de leur départ de Libye. En effet, c'est de manière étayée qu'ils sont revenus sur les contacts à leur domicile avec des personnes en lien avec la mouvance terroriste, appartenant à l'organisation Etat islamique, souhaitant la libération de terroristes d'origine syrienne détenus à Tripoli. Les hautes responsabilités exercées par le père de Mme A...rendent crédibles ces contacts et les pressions exercées à leur encontre afin que le général A.A...cède à leurs revendications. De même, c'est de manière personnalisée qu'ils ont évoqué leur prise de contact avec le général A.A...à la suite de cet évènement, qui leur a intimé de quitter immédiatement leur domicile afin de se rendre à Tripoli, injonction à laquelle ils ont obéi....

6. En troisième et dernier lieu, les sources publiques disponibles et leurs propos constants et cohérents permettent d'établir qu'ils risquent d'être exposés à des persécutions en cas de retour dans leur pays d'origine. En l'occurrence, ils ont été en mesure de relater avec une émotion non feinte la destruction de leur domicile par des terroristes de l'organisation Etat islamique (OEI)à l'origine des menaces à  leur encontre et le danger auxquels ils s'exposeraient en cas de retour dans leur région d'origine. Leurs déclarations sont à cet égard corroborées par les sources publiques disponibles et notamment le "regional overview: Africa 13-19 september 2020"publié par The Armed Conflict Location and Event Data Project (ACLED)le 23 septembre 2020 soulignant que des terroristes de l'OEDI sont présents à Sabha et que le district de cette ville constitue l'une des dernières zones d'activité de cette organisation terroriste en Libye. Enfin, la Cour observe qu'ils seraient dans l'incapacité de se prévaloir de la protection effective des autorités libyennes, le père de Mme A...n'ayant lui-même pas été en mesure de bénéficier d'une protection effective en dépit de ses fonctions comme le relève un article de RFI en date du 21 mai 2020 intitulé"Libye: le chef de renseignement de Fayez el-Sarraj décède da ns des circonstances ambigües".

La qualité de réfugié est reconnue au couple.

Statut de réfugié Opposition à mariage forcé Côte d'Ivoire

  COUR NATIONALE DU DROIT D’ASILE  N° 24002156    19 avril 2024  (6 ème Section, 2 ème Chambre) "...Sur la demande d’asile :  1. Aux te...