mercredi 3 mai 2023

Refus de visa Somalie Protection subsidiaire réunification familiale

 Jugement TA Nantes 28 avril 2023, n°2209921:

 

2. Aux termes de l’article L. 561-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / (…) / 3° Par les enfants non mariés du couple, n'ayant pas dépassé leur dix-neuvième anniversaire. (…) ». L’article L. 561-5 de ce code dispose que : « Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. Ils produisent pour cela les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 121-9 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire. Les documents établis par l'office font foi jusqu'à inscription de faux. ». 3. Aux termes de l’article L. 811-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l’article 47 du code civil (…) ». Aux termes de l’article 47 du code civil : « Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ». Il résulte de ces dispositions que la force probante d’un acte d’état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l’administration de la valeur probante d’un acte d’état civil établi à l’étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l’ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu’un acte d’état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu’il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l’instruction du litige qui lui est soumis.

 

 4. Pour rejeter la demande de visa présentée au profit des demandeurs de visa, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France s’est fondée sur les dispositions précitées et a constaté que les déclarations de la naissance du jeune H K et de Mme K S ont été enregistrées par l’ambassade de la République fédérale de Somalie à Djibouti le 25 octobre 2021, soit sept ans après l’obtention par M. K  A du bénéfice de la protection subsidiaire, et qu’en l’absence d’éléments probants de possession d’état, non contemporains des demandes de visas, l’identité et le lien familial des demandeurs de visa avec le réunifiant ne sont pas établis. 5. Pour établir l’identité et le lien de filiation des demandeurs de visa avec le réunifiant, il est produit deux certificats de naissance délivrés le 25 octobre 2021 par l’ambassade de Somalie auprès de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (Intergovernmental Authority on Development, IGAD), à Djibouti, ainsi que deux passeports délivrés respectivement le 22 mai 2015 pour le jeune Hassan K S et le 10 avril 2021 pour Mme K S qui mentionnent des dates de naissance et les noms de leurs parents identiques à ceux N° 2209921 4 figurant sur les deux certificats de naissance. De tels certificats délivrés plusieurs années après les événements qu’ils relatent, sur déclaration, par une représentation diplomatique pour les besoins de la procédure de réunification familiale ne peuvent recevoir la qualification d’actes d’état civil étranger au sens des dispositions de l’article L. 811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Mais ils peuvent être pris en compte, le cas échéant, pour déterminer l’existence d’une situation de possession d’état. En l’espèce, la circonstance que l’en-tête pré-imprimé et le corps de ces documents comportent quelques fautes d’orthographe en anglais ne suffit pas à leur ôter tout caractère utile pour établir le lien de filiation. M. S A a, de façon constante depuis son arrivée en France, présenté les demandeurs de visas comme ses enfants, ainsi que cela ressort de la fiche familiale de référence datée du 4 avril 2014 et du récit d’asile présenté le 25 février 2013 devant l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), lequel a délivré à M. K S Ali un livret de famille le 12 septembre 2014 ainsi qu’un certificat de mariage tenant lieu d’acte d’état civil et un certificat de décès de Mme S A M établis le 11 août 2014, en application des dispositions de l’article L. 121-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, attestant du mariage de M. KS A et de Mme S A M le 4 août 2003 à Afgoye (Somalie). Ainsi, il ressort des pièces du dossier que les mentions relatives à l’identité, aux dates et lieux de naissance des enfants figurant sur les documents versés sont cohérentes avec les déclarations faites à l’OFPRA par M. K S A lors du dépôt de sa demande d’asile. Dans les circonstances très particulières de l’espèce, il y a lieu de regarder comme établis l’identité du jeune H K Set de Mme K S et leur lien de filiation avec le réunifiant, par le mécanisme de la possession d’état. En outre et au surplus, le requérant justifie de l’envoi de deux versements d’argent vers ses enfants en 2021 et deux autres en 2022 et produit un échange par SMS et trois photos. Par suite, il y a lieu de regarder comme établie l’identité du jeune Hassan K S et de Mme KS et leur lien de filiation avec le réunifiant. Dans ces conditions, la commission de recours a entaché sa décision d’une erreur d’appréciation en refusant de leur délivrer les visas sollicités pour le motif cité au point 3.


Le juge peut décider, malgré la production d'un document n'ayant pas la valeur d'un acte d'état civil que la filiation entre un réfugié statutaire et l'enfant qu'il voulait faire venir dans le cadre d'une réunification familiale est établie sur la base de diverses pièces, toutes concordantes, comme une fiche de vaccination, le passeport du demandeur ou encore le certificat des autorités du village (CAA Nantes, 5 avril 2019, n°18NT03208).

cf aussi, CAA Nantes, 21 septembre 2022, n°22NT0155

CAA Nantes, 31 janvier 2023, n°21NT02603



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